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30 septembre 2008

Crise financière et crédit :Rosa Luxemburg

Rosa_Luxemburg_1_

Rosa Luxemburg:

L' adaptation du capitalisme

« Commençons par le crédit. De ses multiples fonctions dans l’économie capitaliste, la plus importante consiste à accroître la capacité d’extension de la production et à faciliter l’échange. Au cas où la tendance interne de la production capitaliste à un accroissement illimité se heurte aux limites de la propriété privée, aux dimensions restreintes du capital privé, le crédit apparaît comme le moyen de surmonter ces limites dans le cadre du capitalisme ; il intervient pour concentrer un grand nombre de capitaux privés en un seul - c’est le système des sociétés par actions - et pour assurer aux capitalistes la disposition de capitaux étrangers - c’est le système du crédit industriel. Par ailleurs, le crédit commercial accélère l’échange des marchandises, donc le reflux du capital dans le circuit de la production.

On se rend aisément compte de l’influence qu’exercent ces deux fonctions essentielles du crédit sur la formation des crises. On sait que les crises résultent de la contradiction entre la capacité d’extension, la tendance à l’expansion de la production d’une part, et la capacité de consommation restreinte du marché d’autre part ; en ce sens le crédit est précisément, nous l’avons vu plus haut, le moyen spécifique de faire éclater cette contradiction aussi souvent que possible. Tout d’abord, il augmente la capacité d’extension de la production dans des proportions gigantesques ; il est la force motrice interne qui la pousse à dépasser constamment les limites du marché.

Mais il frappe de deux côtés. En sa qualité de facteur de la production, il a contribué à provoquer la surproduction ; en sa qualité de facteur d’échange il ne fait, pendant la crise, qu’aider à la destruction radicale des forces productives qu’il a lui-même mises en marche.

Dès les premiers symptômes d’engorgement du marché, le crédit fond ; il abandonne la fonction de l’échange précisément au moment où celui-ci serait indispensable ; il révèle son inefficacité et son inutilité quand il existe encore, et contribue au cours de la crise à réduire au minimum la capacité de consommation du marché. Nous avons cité les deux effets principaux du crédit ; il agit encore diversement sur la formation des crises.

Non seulement il offre au capitaliste la possibilité de recourir aux capitaux étrangers, mais encore il l’encourage à faire un usage hardi et sans scrupules de la propriété d’autrui, autrement dit il l’incite à des spéculations hasardeuses. Ainsi, en qualité de facteur secret d’échange de marchandises, non seulement il aggrave la crise, mais encore il facilite son apparition et son extension, en faisant de l’échange un mécanisme extrêmement complexe et artificiel, ayant pour base réelle un minimum d’argent métallique ; de ce fait, il provoque, à la moindre occasion, des troubles dans ce mécanisme.

Ainsi le crédit, loin de contribuer à abolir ou même à atténuer les crises, en est au contraire un agent puissant. Il ne peut d’ailleurs en être autrement. La fonction spécifique du crédit consiste - très généralement parlant - à corriger tout ce que le système capitaliste peut avoir de rigidité en y introduisant toute l’élasticité possible, à rendre toutes les forces capitalistes extensibles, relatives et sensibles. Il ne fait évidemment ainsi que faciliter et qu’exaspérer les crises, celles-ci étant définies comme le heurt périodique entre les forces contradictoires de l’économie capitaliste.

Ceci nous amène à une autre question : comment le crédit peut-il apparaître comme un " facteur d’adaptation " du capitalisme ? Sous quelque forme qu’on s’imagine cette adaptation, sa fonction ne pourrait consister qu’à réduire un antagonisme quelconque du capitalisme, à en résoudre ou en atténuer une contradiction en débloquant des forces grippées à tel ou tel point du mécanisme. Or, s’il existe un moyen d’exaspérer au plus haut point les contradictions de l’économie capitaliste actuelle, c’est bien le crédit.

Il aggrave la contradiction entre le mode de production et le mode d’échange en favorisant au maximum la tendance à l’expansion de la production, tout en paralysant l’échange à la moindre occasion. Il aggrave la contradiction entre le mode de production et le mode d’appropriation en séparant la production de la propriété, en transformant le capital en capital social ; mais par ailleurs en donnant à une partie du profit la forme d’intérêt du capital, donc en le réduisant à être un simple titre de propriété. Il aggrave la contradiction entre les rapports de propriété et les rapports de production, en expropriant un grand nombre de petits capitalistes et en concentrant entre les mains de quelques-uns des forces productives considérables. Il aggrave la contradiction entre le caractère social de la production et le caractère privé de la propriété capitaliste en rendant nécessaire l’intervention de l’Etat dans la production (création de sociétés par actions).

En un mot, le crédit ne fait que reproduire les contradictions cardinales du capitalisme, il les exaspère, il accélère l’évolution qui en précipitera l’anéantissement, l’effondrement. Le premier moyen d’adaptation du capitalisme quant au crédit devait être la suppression du crédit, l’abolition de ses effets. Tel qu’il est, celui-ci ne constitue nullement un moyen d’adaptation, mais un facteur de destruction à l’effet profondément révolutionnaire. Ce caractère révolutionnaire qui conduit le crédit à dépasser le capitalisme n’a-t-il pas été jusqu’à inspirer des plans de réforme d’esprit plus ou moins socialiste ? Il n’est qu’à voir ce grand représentant du crédit qu’est en France un Isaac Péreire [2] et que ces plans de réforme font apparaître, selon Marx, à moitié comme un prophète et à moitié comme une canaille.( Voir Annexe 4)»( « Commençons par le crédit. De ses multiples fonctions dans l’économie capitaliste, la plus importante consiste à accroître la capacité d’extension de la production et à faciliter l’échange. Au cas où la tendance interne de la production capitaliste à un accroissement illimité se heurte aux limites de la propriété privée, aux dimensions restreintes du capital privé, le crédit apparaît comme le moyen de surmonter ces limites dans le cadre du capitalisme ; il intervient pour concentrer un grand nombre de capitaux privés en un seul - c’est le système des sociétés par actions - et pour assurer aux capitalistes la disposition de capitaux étrangers - c’est le système du crédit industriel. Par ailleurs, le crédit commercial accélère l’échange des marchandises, donc le reflux du capital dans le circuit de la production.

On se rend aisément compte de l’influence qu’exercent ces deux fonctions essentielles du crédit sur la formation des crises. On sait que les crises résultent de la contradiction entre la capacité d’extension, la tendance à l’expansion de la production d’une part, et la capacité de consommation restreinte du marché d’autre part ; en ce sens le crédit est précisément, nous l’avons vu plus haut, le moyen spécifique de faire éclater cette contradiction aussi souvent que possible. Tout d’abord, il augmente la capacité d’extension de la production dans des proportions gigantesques ; il est la force motrice interne qui la pousse à dépasser constamment les limites du marché.

Mais il frappe de deux côtés. En sa qualité de facteur de la production, il a contribué à provoquer la surproduction ; en sa qualité de facteur d’échange il ne fait, pendant la crise, qu’aider à la destruction radicale des forces productives qu’il a lui-même mises en marche.

Dès les premiers symptômes d’engorgement du marché, le crédit fond ; il abandonne la fonction de l’échange précisément au moment où celui-ci serait indispensable ; il révèle son inefficacité et son inutilité quand il existe encore, et contribue au cours de la crise à réduire au minimum la capacité de consommation du marché. Nous avons cité les deux effets principaux du crédit ; il agit encore diversement sur la formation des crises.

Non seulement il offre au capitaliste la possibilité de recourir aux capitaux étrangers, mais encore il l’encourage à faire un usage hardi et sans scrupules de la propriété d’autrui, autrement dit il l’incite à des spéculations hasardeuses. Ainsi, en qualité de facteur secret d’échange de marchandises, non seulement il aggrave la crise, mais encore il facilite son apparition et son extension, en faisant de l’échange un mécanisme extrêmement complexe et artificiel, ayant pour base réelle un minimum d’argent métallique ; de ce fait, il provoque, à la moindre occasion, des troubles dans ce mécanisme.

Ainsi le crédit, loin de contribuer à abolir ou même à atténuer les crises, en est au contraire un agent puissant. Il ne peut d’ailleurs en être autrement. La fonction spécifique du crédit consiste - très généralement parlant - à corriger tout ce que le système capitaliste peut avoir de rigidité en y introduisant toute l’élasticité possible, à rendre toutes les forces capitalistes extensibles, relatives et sensibles. Il ne fait évidemment ainsi que faciliter et qu’exaspérer les crises, celles-ci étant définies comme le heurt périodique entre les forces contradictoires de l’économie capitaliste.

Ceci nous amène à une autre question : comment le crédit peut-il apparaître comme un " facteur d’adaptation " du capitalisme ? Sous quelque forme qu’on s’imagine cette adaptation, sa fonction ne pourrait consister qu’à réduire un antagonisme quelconque du capitalisme, à en résoudre ou en atténuer une contradiction en débloquant des forces grippées à tel ou tel point du mécanisme. Or, s’il existe un moyen d’exaspérer au plus haut point les contradictions de l’économie capitaliste actuelle, c’est bien le crédit.


Il aggrave la contradiction entre le mode de production et le mode d’échange en favorisant au maximum la tendance à l’expansion de la production, tout en paralysant l’échange à la moindre occasion. Il aggrave la contradiction entre le mode de production et le mode d’appropriation en séparant la production de la propriété, en transformant le capital en capital social ; mais par ailleurs en donnant à une partie du profit la forme d’intérêt du capital, donc en le réduisant à être un simple titre de propriété. Il aggrave la contradiction entre les rapports de propriété et les rapports de production, en expropriant un grand nombre de petits capitalistes et en concentrant entre les mains de quelques-uns des forces productives considérables. Il aggrave la contradiction entre le caractère social de la production et le caractère privé de la propriété capitaliste en rendant nécessaire l’intervention de l’Etat dans la production (création de sociétés par actions).

En un mot, le crédit ne fait que reproduire les contradictions cardinales du capitalisme, il les exaspère, il accélère l’évolution qui en précipitera l’anéantissement, l’effondrement. Le premier moyen d’adaptation du capitalisme quant au crédit devait être la suppression du crédit, l’abolition de ses effets. Tel qu’il est, celui-ci ne constitue nullement un moyen d’adaptation, mais un facteur de destruction à l’effet profondément révolutionnaire. Ce caractère révolutionnaire qui conduit le crédit à dépasser le capitalisme n’a-t-il pas été jusqu’à inspirer des plans de réforme d’esprit plus ou moins socialiste ? Il n’est qu’à voir ce grand représentant du crédit qu’est en France un Isaac Péreire [2] et que ces plans de réforme font apparaître, selon Marx, à moitié comme un prophète et à moitié comme une canaille.( Voir Annexe 4)»( Rosa Luxemburg, L' adaptation du capitalisme, ed. Petite collection maspéro, p.23-25 , extrait.)

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