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23 février 2015

L’INTERPRÉTATION DU MARXISME PAR LENINE. ( CAJO BRENDEL)

Cajo_Brendel

En I848, lorsque Marx et Engels publièrent le « Manifeste »,ils y exposaient que le prolétariat devait. utiliser son pouvoir politique pour « arracher petit à petit tout le capital,pour centraliser tous les instruments de production entre les mains de l’État, c’est à dire du prolétariat organisé en classé dirigeante. »

Cette formule sert aux réformistes de tous· les pays. pour défendre une politique et un programme de mesures sociales plus ou moins progressives dans le cadre de la démocratie actuelle. C’est ce passage qui peut éclaircir dans un certain sens(c’est à dire quand on néglige les causes sociales du point de vue social-démocrate) pourquoi les social- démocrates de tous les pays, ou bien les socialistes qui sont issus de la social-démocratie ,veulent établir une. société dans laquelle l’appareil de production passerait des mains de la bourgeoisie aux mains de l’État.
Les social-démocrates ont tort;ils ne peuvent pas se servir du « Manifeste pour défendre leur politique. Car pas un seul d’entre eux ne s’est jamais rendu compte de la contradiction que Marx aurait laissé apparaître dans le « Manifeste » entre ce prétendu transfert des instruments de production des mains de la bourgeoisie aux mains de l’État (I),et ce passage du « Manifeste »:

« Le gouvernement moderne n’est qu’un comité qui gère les affaires communes de la bourgeoisie tout entière. »

Et cette contradiction est encore plus évidente quand on considère le fait que Marx dans ce qu’il a. publié avant le « Manifeste » analysait déjà le caractère de l’État,le combattait d’une façon impitoyable,et,de plus,dénonçait l’esprit de la petite bourgeoisie qui se dissimulait derrière les idéaux démocratiques.
Cette contradiction ne se trouve que dans la tête des réformistes et en aucune ‘manière chez Marx qui n’a jamais prétendu que la classe; ouvrière peut saisir le pouvoir dans le cadre de la démocratie existante tout en maintenant l’ordre capitaliste. Au contraire,Marx et Engels ont bien compris que cela était impossible;la preuve en est dans la phrase que nous venons de citer, et pour laquelle les réformistes ont tant de prédilection lorsqu’ils défendent leurs positions.

Les mots « c’est à dire » que nous avons souligné,montrent très clairement que pour Marx, »l’État » équivaut au « prolétariat organisé en classe dirigeante ». Cette équivalence découle des opinions exposées dans le « Manifeste » sur le cours de la révolution prolétarienne.

Marx et Engels pensaient en !848 que le prolétariat,lorsqu1il se constituait en classe dirigeante pouvait faire changer le caractère de l’État, pouvait transformer un instrument de la bourgeoisie en un instrument de la classe ouvrière. L’ État qui s’identifie à « un comité qui gère les affaires communes de la bourgeoisie tout entière » et l ‘État qui s’ identifie au  »prolétariat organisé en classe dirigeante »,ce sont dans le « Manifeste » deux choses bien distinctes deux phases bien distinctes du développement social. Entre ces deux phases,il y a le bouleversement de l’ordre social de notre époque. Tout ceci est bien clair, car dans le « Manifeste » , après le phrase citée vient ce passage:

« A la place de l’ancienne société bourgeoise avec ses classes et ses antagonismes de classe surgit une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous. »

Il est bien vrai, que dans le même chapitre du « Manifeste »,on peut lire que « la première étape dans la révolution ouvrière est la constitution du prolétariat en classe dominante,la conquête de la démocratie », mais la seule conclusion possible est que Marx exprimait en I848 par le terme « démocratie » tout autre chose que, par exemple,la situation sociale qu’on peut mettre sous ce mot au XX° siècle. Par « démocratie », il entendait ce que Robespierre ou Babeuf y entendaient
Les opinions de Marx et d’Engels sur 1a démocratie s’appliquaient aux traditions des jacobins français,mais cela ne veut pas dire qu’ il n’existait pas de divergences entre les jacobins d’une part,et Marx et Engels d’autre part.
Les auteurs du « Manifeste » affirment énergiquement que la conquête de la démocratie,la conquête du pouvoir politique par le prolétariat est le premier pas dans la révolution prolétarienne. Ils ne
veulent pas du tout s’en tenir à la démocratie; ils entendent que le prolétariat utilise son pouvoir politique pour supprimer la propriété bourgeoise. Alors que les démocrates veulent finir la révolution aussitôt que possible, nous voulons, dit Marx dans un discours au Bureau central de la Ligue des Communistes,nous voulons faire la révolution permanente, jusqu’au moment où le pouvoir est conquis par le prolétariat et où l’existence des classes est supprimée; alors il faut que les ouvriers prennent une position indépendante et qu’ils ne se laissent pas arrêter un moment par les phrases hypocrites des démocrates pour réaliser 1’organisation indépendante du parti du prolétariat. Il faut que leur slogan soit la révolution permanente. »

Une illusion

La perspective d’une révolution permanente était une illusion,la révolution de I848 l’a montré de façon indiscutable. Les hommes de gauche s’emparèrent en France .de positions importantes,mais il leur fut impossible de réaliser la démocratie jacobine, le premier pas vers la révolution ouvrière.

Selon Marx et Engels,la conquête de la démocratie dans le sens de 1848 et I793 (l’année au cours de laquelle les jacobins s’emparèrent du pouvoir) était la condition première de toute réalisation communiste ;mais cette démocratie, c’est à dire le jacobinisme), c’est à dire le prolétariat organisé en classe dirigeante à la tête de toutes les couches pauvres du peuple ne pouvait pas être conquise en 1848. En effet,toutes les attaques du jacobinisme ne touchaient que la façade du bâtiment de l’État et dans ces circonstances,toutes les résolutions des ministres jacobins restaient seulement des plans. Ainsi,non seulement les perspectives de la révolution permanente mais aussi ce que voulait la démocratie révolutionnaire de I848 n’étaient que châteaux en Espagne.
Voilà pourquoi les perspectives du « Manifeste » sur la révolution qui devait venir ne se sont pas réalisées. En I850,déjà,Marx constatait:

« En imposant la République au gouvernement provisoire et, ce dernier à toute la France,le prolétariat se mettait immédiatement au premier plan en tant que parti indépendant;mais du même coup,il jetait un défi à toute la France bourgeoise. Ce qu’il avait conquis, c’éait le terrain en vue de
la lutte pour son émancipation révolutionnaire, mais nullement cette émancipation elle-même. »

un peu plus loin,Marx écrit:

« Nous avons vu que la République de Février n’ était en réalité,ne pouvait être qu’une République
bourgeoise,que; d’autre part,le gouvernement provisoire,sous la pression directe du prolétariat,
fut obligé de la proclamer une République pourvue d’institutions sociales,que le prolétariat
parisien était incapable d’aller au-delà de la République bourgeoise autrement qu’en idée,
en imagination. » (2) .

En I848,Marx et Engels écrivaient au commencement du « Manifeste » « Un spectre hante l’Europe,le spectre du Communisme ». En I850,on voyait distinctement que le communisme n’était en effet
qu’un spectre et que la lutte réelle entre la bourgeoisie et le prolétariat était encore à commencer. C’était une nouvelle perspective que les auteurs du « Manifeste » avaient acquise par les expériences
de la lutte ainsi qu’il ressort de différents témoignages.

Opinions nouvelles

En 1878, Marx écrit que la Commune de Paris était « la forme enfin découverte sous laquelle la libération économique de la classe ouvrière pouvait avoir lieu » et en même temps,il indiquait, comme auparavant, que l’opinion du « Manifeste » était inexacte. Il démontrait que « la transformation de 1 ‘État d’instrument entre les mains de la bourgeoisie en instrument du prolétariat » n’était pas la forme politique de la révolution prolétarienne. Marx l’a expliqué plus clairement
dans la Guerre Civile en France: « La classe ouvrière ne peut pas s’emparer d’une machine d’État donnée et l’utiliser pour ses propres besoins »

et dans une lettre à son ami Kugelmann:

« La prochaine tentative de la révolution en France devra consister non plus à faire passer la machine bureaucratique militaire en d’autres mains, comme ce fut le cas jusqu’ici mais à la détruire. C’est la condition première de toute révolution véritablement populaire sur le continent. » (3)

Plus tard,quand il insiste sur cette pensée, Engels parle aussi de la « destruction du vieux pouvoir d’État. » Différence importante avec le « Manifeste ». Ici,nous abordons le vrai sujet de cet article où nous voulons montrer très brièvement comment Lénine comprit , les critiques que les auteurs du « Manifeste. » firent au « Manifeste » lui m~me de I84I à I872. Nous le ferons d’abord en examinant le texte bien connu « L’État et la Révolution ».

II

A première vue, Lénine surpasse de beaucoup les réformistes. Il cite le passage de Marx « la classe ouvrière ne peut pas s’emparer simplement d’une machine d’État donnée et l’utiliser pour ses propres besoins ». Il écrit,et avec raison,que selon Marx la machine d’État doit être détruite et il parle comme Engels du « dépérissement de l’ État » qui au début d’une société sans classe « doit être relégué au musée des antiquités ».
Mais quiconque lit attentivement « l’État et la Révolution » et compare les conclusions de cet ouvrage avec la pensée de Marx et Engels constate que Lénine non plus n’a pas compris l’auto-critique et donne une mauvaise interprétation du marxisme. Quand Lénine dans « L’État et la Révolution »(4) parle du « Manifeste », il montre que Marx et Engels y identifient l’État et le »prolétariat organisé en classe dirigeante »(5) Mais il ne voit pas que tout cela vient de ce que Marx et Engels pensaient en I848 que les ouvriers n’avaient qu’à s’emparer de la machine d’État pour l’utiliser pour leurs besoins. En d’autres termes,qu’ils considéraient encore la conquête de la démocratie jacobine comme le premier pas dans la révolution ouvrière.

Lénine:un jacobin

En I9I7,Lénine considère encore ce que le « Manifeste » propose comme la première tâche du prolétariat; il ajoute que cela était sans conteste l’opinion de Marx en dépit de la déclaration d’ Engels affirmant sans équivoque que l’histoire avait révélé que la vieille opinion de Marx était une illusion. Il y a bien un passage dans la brochure de Lénine où il est dit que Marx et Engels corrigèrent le « manifeste » après 1’expérience de la Commune de Paris (6) .Mais il affirme cependant:

« Le prolétariat a besoin du pouvoir d’État, de l’ organisation centralisée de la force,de l’organisation
de la violence pour réprimer la résistance des exploiteurs et aussi pour diriger la grande masse de la population-la paysannerie, la petite bourgeoisie,les semi prolétaires-dans « l’aménagement de l’économie socialiste « ; l’État poursuit Lénine « c’est à dire le prolétariat organisé en classe dominante-cette théorie de Marx est indissolublement liée à toute sa doctrine sur le rôle révolutionnaire du prolétariat dans l’histoire: l’aboutissement de ce rôle est 1a dictature prolétarienne,la domination politique du prolétariat. (7)

Tout ceci prouve que Lénine entend par dictature du prolétariat: l’État qui est transformé en prolétariat organisé en classe dominante .En effet, Marx et Engels parlaient en ce sens de dictature du prolétariat, mais en I848. Passé I848,le mot dictature du prolétariat prend chez Marx et Engels une autre signification parce que la dictature du prolétariat au sens de !848 s’est révélée une illusion.
Lénine n’a pas perçu ce changement de signification et corrélativement,il a une conception erronée de la révolution de 1848.

« Les démocrates petits-bourgeois, ces pseudo-socialistes qui ont substitué à la lutte des classes leurs rêveries sur l’entente des classes, se représentaient la transformation socialiste, elle aussi, comme une sorte de rêve sous la forme, non point du renversement de la domination de la classe exploiteuse, mais d’une soumission pacifique de la minorité à la majorité consciente de ses tâches. Cette utopie petite-bourgeoise, indissolublement liée à la notion d’un État placé au-dessus des classes, a abouti pratiquement à la trahison des intérêts des classes laborieuses, comme l’a montré, par exemple, l’histoire des révolutions françaises de 1848 et 1871, comme l’a montré l’expérience de la participation « socialiste » aux ministères bourgeois en Angleterre, en France, en Italie et en d’autres pays à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. (8)

Que Lénine ne fasse pas de différence entre les démocrates de I848 et les gouvernements « démocrates » du type Waldeck-Rousseau (9) prouve qu’il ne s’est pas rendu compte des différences entre la démocratie de Robespierre (La démocratie jacobine, la dictature du prolétariat au sens de 1848) et la démocratie « de la deuxième partie du XIX° siècle alors,il n’a pas non plus compris que les démocrates petit-bourgeois de I848,les Ledru-Rollin, les Louis Blanc voulaient exactement’!lent ce que Marx et Engels ont appelé « le premier pas dans la révolution des ouvriers et 1’organisation du prolétariat en classe dominante. »
Et Lénine se trompe quand il écrit « qui reconnaît uniquement la loi de classe n’est pas encore marxiste; il peut se faire qu’il ne sorte pas encore de la pens6e bourgeoise et de la politique bourgeoise … N’ est marxiste que celui qui étend la reconnaissance de la loi de classe jusqu’à la reconnaissance de la dictature du prolétariat. » (10).
Lénine se trompe puisque non seulement celui qui reconnaît l’existence de la loi de classe peut se mouvoir à 1’intérieur des frontières de la politique bourgeoise et de 1a pensée bourgeoise,mais
aussi celui qui veut la dictature du prolétariat. Cela,les jacobins 1’ont pratiquement prouvé en I793 et en !848.

Une différence énorme

Entre la dictature du prolétariat telle que la conçoit Lénine et telle que la concevaient Marx et Engels dans la deuxième partie de leur vie, il y a une grande différence. Lénine écrit:

« Le Manifeste communiste tire les leçons générales de l’histoire qui nous font voir dans 1’État un organisme de domination de classe et nous mènent à cette conclusion nécessaire: le prolétariat ne saurait renverser la bourgeoisie sans avoir d’abord conquis le pouvoir politique,sans avoir établi, sa domination politique,sans s’être organisé en classe dominante,et érigé en État. »(II)

Certainement Lénine donne ici un résumé exact du « Manifeste ». Mais cela manque d’explications et la leçon de la République de Février 1848 en France et précisément la suite:que le prolétariat ne peut pas conquérir le pouvoir politique d’abord pour chasser ensuite la bourgeoisie, parce que le pouvoir politique du prolétariat n’a aucune signification tant que la bourgeoisie n’est pas encore chassée. Pour autant qu’il existe des rapports de production sur lesquels est fondé le pouvoir politique de la bourgeoisie, pour autant qu’existent les rapports sociaux dont l’État bourgeois est le produit, pour autant l’État qui est instrument entre les mains de la bourgeoisie ne peut pas être transformé en un instrument pouvant être utilisé contre cette classe. La conclusion de Marx est qu’il
faut détruire l’État bourgeois, ce qui signifie et ne , peut avoir que ce sens:il faut détruire aussi les rapports sociaux correspondants à cet État.

État et société

Marx considère l’État comme un phénomène historique de la société. Pour lui, l’État et la société ne sont pas deux choses distinctes il n’existe pas de contradiction entre elles; ce qui se présente
comme une telle contradiction n’est que ce qu’on appelle une contradiction dans une mauvaise terminologie,c’est en réalité l’antagonisme entre le développement des forces productives et leur utilisation sociale protégée par l’ordre de l’État. Mais cette contradiction se produit parce que la société et l’État ne sont pas deux choses essentiellement différentes. Dans certaines conditions réalisées au cours de l’histoire,la société n’existe que sous la forme de l’État.
Et quand on ne considère l’État que comme une partie de la société, quand on ne sépare pas en pensée la société et l’État, on n’a pas besoin de vaincre cette séparation, et il n’est pas nécessaire de rechercher une solution parce que cette contradiction entre l’État et la société n’ est qu’une apparence fallacieuse.
Il en est ainsi dans la théorie de Marx lorsqu’il a révélé le caractère fétichiste de la marchandise (I2), c’est à dire l’apparence fallacieuse d’une indépendance inhérente à la marchandise, l’apparence
que la marchandise mène une vie indépendante par rapport à l’homme. On doit refuser de la même façon le fétichisme de l’État c’est à dire l’indépendance d’une personnalité d’État en face de la société. Lénine n’a pas compris tout cela, et c’est pourquoi il interprète d’ une mauvaise manière les paroles d ‘Engels sur « L’État dépérit ».

III

Chez Lénine, l’État bourgeois existe avant la révolution prolétarienne, et l’ État prolétarien existe après. Selon Lénine, les paroles d’ Engels sur le dépérissement de l’État se rapportent au dépérissement de « l’État prolétarien », tandis que là où Marx et Engels parlent respectivement de détruire l’État et d’abolir l’état,cela se rapporte à l’État bourgeois.(13). Cette différence entre un État bourgeois qu’il faut détruire et un État prolétarien qui le remplacera et périra n’existe pas chez Marx
et Engels; chez eux, la destruction de l’État de la classe bourgeoise est aussi un changement dans les relations sociales: la transformation des moyens de production en propriété commune. Et cela parce que, quand la propriété bourgeoise existe,la société à la forme de l’État, mais au moment où. les moyens de production sont devenus propriété commune l’intervention, comme dit Engels « d’un pouvoir d’État dans les rapports sociaux devient superflue dans un domaine après l’ autre,et ensuite entre d’elle-même en sommeil. »Il ajoute directement:
« Le gouvernement des choses fait place à l’administration des choses et à la direction d’opérations de production. L’État n’est pas aboli, il meurt. » Engels se sert ici d’une terminologie qui, à première vue est en contradiction avec nos opinions; il écrit:

« Le prolétariat s’empare de la puissance de l’État et transforme les moyens de production tout d’abord en propriété de l’État. Mais par là il s’abolit lui-même en tant que prolétariat; par là,il abolit toutes les différences. et les antagonismes de classe,et par là aussi,l’État en tant qu’État »

Apparemment Engels défends ici la théorie de « l’État prolétarien »; en réalité il ne la défend pas. Car c’est un État bien singulier que celui qui commence comme dit Engels un peu plus loin, par un acte
qui est en même temps son dernier acte en tant qu’État. De plus,chez lui il n’est pas question que la classe ouvrière utilise 1′ État pour ses propres besoins,avec le changement des moyens de production « l’État est aboli en tant qu’État. »

« L’État, poursuit Engels,était le représentant officiel de la société tout entière,sa synthèse en un corps visible, mais il ne l’était que dans la mesure où il était l’État de la classe qui elle-même représentait pour son époque la société tout entière:dans l’antiquité: État des citoyens propriétaires d’esclaves; au moyen âge: État de la noblesse féodale;de nos jours: État de la bourgeoisie. » (I4)

Est ce qu’Engels poursuit ce développement en voulant dire que sous la dictature prolétarienne le prolétariat représente la société et qu’alors l’État est un État prolétarien? Pas du tout. Engels dit: « Mais du fait qu’il (l’État) devient enfin. le représentant effectif de la société tout entière, lui-même devient superflu. « Ce sont ces mots dans le passage d’ Engels qui sont de la plus. haute importance pour la contradiction de ce qui fut dit, ces mots expriment d’une autre manière la pensée que c’est seulement dans certaines conditions historiques, notamment alors qu’existent la propriété privée et l’ antagonisme de classe qui en découle, qu’il peut être question de 1’État. · · ·

En se référant au fait qu’Engels appelle un peu plus loin l’État « un pouvoir spécial de répression » ,Lénine conclut qu’il faut remplacer ce pouvoir spécial de répression « de la bourgeoisie » par un
autre pouvoir spécial de répression (du prolétariat). Cela contredit l’opinion d’ Engels selon laquelle l’État se rend lui même superflu dès qu’il n’y a plus rien à réprimer. Lénine le reconnaît en un autre lieu lorsqu’il dit: »or,du moment que c’est la majorité du peuple qui opprime elle-même ses oppresseurs, plus n’ est besoin d’une force spéciale de répression. » ,et ajoute « c ‘est en ce
sens que l’État commence à dépérir. » ;mais chez lui,le « dépérissement » est naturellement en rapport avec »l’État prolétarien » parce qu’une chose comme le dépérissement de l’État bourgeois déjà détruit reste pour lui toujours le problème qui le fait trébucher.

Ce dernier fait apparaît aussi quand Lénine vient parler d’un phénomène comme. « le maintien de l’étroit horizon du droit bourgeois en régime capitaliste de sa première phase »(I5)Dans la théorie sociale de Marx,c’est quelque· chose qui va de soi à l.’encontre de ceux qui croient que le droit est fixé par l’État. Marx démontre que « la législation politique comme; la législation civile n’est que le produit de relations économiques qu’elles codifient » (!6)

« la société,dit Marx, n’est pas fondée sur les lois, mais les lois sont fondées sur la société. »(17)

Qu’est-ce que cela signifie à l’égard du problème qui nous préoccupe? Des changements dans les manières de production mènent à de nouveaux rapports sociaux qui sont formulés par de nouvelles règles de droit. Quelques unes des anciennes règles juridiques qui étaient liées à la structure ancienne de la société disparaissent. Elles ne sont plus nécessaires pour formuler juridiquement une relation sociale parce que cette relation a disparu avec le changement de la structure sociale.

Mais elles ne disparaissent pas tout de suite. Souvent,elles subsistent parmi les autres règles qui sont déjà complètement en concordance avec les relations sociales nouvelles. Ainsi,on trouve des règles individuelles dans la période du capitalisme. Ainsi,le communisme,dans la première phase de son développement ne sera pas complètement: délivré des traditions et des vestiges du capitalisme. Mais le terrain qui domine ces règles juridiques bourgeoises dans la période du communisme devient de plus plus restreint,et leur validité va s’amenuisant;voilà exactement ce qui était caractérisé par Engels par les mots: »L’État dépérit. »

Quand Lénine démontre ce phénomène on attend que lui aussi reconnais se qu’il est ici question du dépérissement de l’État bourgeois,mais il ne le fait pas. Il écrit:

« Certes le droit bourgeois… suppose nécessairement un État bourgeois car le droit n’est rien sans un appareil capable de contraindre à l’observation des règles du droit. »(I8)

Alors chez Lénine, le droit dépend de l’État »; le droit et l’État ne sont pas conçus comme la conséquence des relations sociales. Il ne tient à nul moment compte du fait que les relations juridiques entre les hommes se modifient plus lentement que les relations sociales dont elles sont le reflet. La conséquence bien singulière est que Lénine qui veut nier le dépérissement de l’État bourgeois puisque celui-ci est déjà détruit conclut finalement:

« Il s’ensuit qu’en régime communiste, non seulement le droit bourgeois mais aussi l’État bourgeois sans bourgeoisie subsiste pendant un certain temps. » (I9)

On se demande comment cela peut être possible.

IV

Quand Engels parle de dépérissement de l’État, il parle de l’État bourgeois. Lénine le nie puisqu’il ne comprend pas comment cet État peut dépérir après sa destruction et son abolition par la révolution. Voilà pour qui il conclut qu’ Engels parle d’un autre État, « l’État prolétarien » et qu’il se réfère à l’opinion ancienne de Marx selon laquelle « la dictature prolétarienne, équivaut à l’État transformé en prolétariat organisé en classe dominante ».
Chez Marx et Engels,la révolution prolétarienne est une révolution sociale: la transformation des moyens de production en propriété commune. Cette révolution sociale détruit l’État puisqu’elle abolit les relations sociales dont l’État est le produit. Voilà exactement ce dont l’État touché mortellement dépérit.

Il est exact que Marx a écrit que la Commune servirait la transformation des bases .économiques sur lesquelles reposent 1’existence des classes et le pouvoir des classes. Mais celui qui veut conclure de cela que Marx pense que la révolution ouvrière doit se forger un instrument politique grâce auquel dans la première phase du Communisme la société sera transformée, celui qui donne aux formes politiques de la dictature prolétarienne une indépendance à 1’égard de leur contenu social celui-là est trompé par le caractère. fétichiste de l’État bourgeois. La Commune était la forme politique enfin découverte sous laquelle la libération économique du travail pouvait être réellement. Mais la naissance de cette forme politique:
et la libération économique des travailleurs sont deux phases d’un même procès (20) puisque les hommes qui forment les relations sociales en rapport avec leur production matérielle produisent aussi les principes,les idées et les catégories en rapport avec leurs relations sociales.
La révolution prolétarienne est selon Lénine « la transformation de l’État bourgeois en État prolétarien ». Il écrit la tâche de cet État prolétarien de 1a manière suivante:

« Jusqu’à l’avènement de la phase supérieure du communisme les socialistes réclament de la société et de l’État le contrôle le plus rigoureux de la mesure de travail et de la mesure de la consommation; mais ce contrôle doit commencer par l’expropriation des capitalistes,par le contrôle des ouvriers sur les capitalistes il doit être exercé non par l’État des fonctionnaires,mais par l ‘État des ouvriers. » (21-) .

On,voit que Lénine parle ici distinctement de l’État et de la société comme de deux choses différentes. Il n’est pas étonnant qu’il dise aussi que :

« Seule la révolution peut supprimer l’État bourgeois , et que l’État en général, c’est à dire la démocratie la plus complète ne peut que dépérir. » ( 22)

Cela prouve de plus que Lénine n’a pas compris ce que Marx écrivait sur 1a relation-entre État et société puisque « l’État en général » n’est rien d’autre pour lui que la personnalité d’État qui se manifeste comme forme indépendante. En réalité,l’État n’existe que dans la forme historique la société qui est fondée sur la propriété privée: l’État des maîtres d’esclaves,de la noblesse féodale,de la bourgeoisie.

Selon Lénine,et cela en contradiction avec les opinions de Marx et d’ Engels telles qu’elles se sont développées après 1848, l’expropriation des capitalistes doit avoir lieu après la révolution par « l’État
prolétarien ». Voilà la condition ancienne du « Manifeste selon laquelle le prolétariat doit utiliser son pouvoir politique pour arracher progressivement tout le capital à la bourgeoisie .Non seulement dans « L’État et la Révolution » ,mais aussi dans les autres articles et publications qui sont caractéristiques des opinions de Lénine,il est montré clairement que les opinions des bolchévistes correspondent au programme marxiste de l’année I848. Lénine dit par exemple dans un article écrit en septembre 1917 que:

« La question principale de chaque révolution est sans . doute la question du pouvoir d’État. »(23),et il ne met pas au premier plan la question du changement de la structure économique. C’est bien. compréhensible quand on est d’avis que le prolétariat doit transformer l’État bourgeois en État prolétarien; pour qui veut se donner la peine de lire la brochure de Lénine intitulée: « Les Bolchévistes garderont-ils le pouvoir d’État »,cet écrit apportera beaucoup de preuves de tout ce que nous avons écrit ici sur les opinions de Lénine.

V

Comment peut-on expliquer que Lénine dans ses tentatives » d’expliquer à nouveau les vraies théories marxistes de l’État » n’ oublie pas de tenir compte de l’analyse de Marx de la Commune de Paris, et même dit énergiquement qu’il faut détruire l’État bourgeois et que néanmoins il se réfère à chaque instant à l’opinion du « Manifeste Communiste » que Marx et Engels ont corrigé. La réponse à cette question est déjà donnée par Marx lui-même lorsqu’il écrit:

« La théorie chez un peuple,c’est réellement toujours dans la mesure où elle est ln réalisation de ses besoins. »On ne peut pas dire que Lénine et les bolchévistes tentaient à réaliser une mauvaise
opinion du marxisme dans la révolution russe; au contraire c’est la praxis de la révolution russe, ce sont les problèmes et la tâche historique de cette révolution qui les a conduit à une opinion mauvaise (si on veut plus tard corrigée) du marxisme .

Dans la Russie féodale , agraire et arriérée du tsar Nicolas II avec sa propriété rurale, sa bureaucratie réactionnaire et ses paysans qui n’étaient pas encore complètement sortis du servage,on trouve, à quelques exceptions prés, toutes les conditions qui existaient en Europe occidentale à l’aube de la révolution de I848. Il existait en Russie par suite des besoins militaires du tsarisme,et soutenu par le capital étranger qui cherchait le profit, une industrie, et par conséquent une bourgeoisie non encore parvenue à l’état adulte. On trouvait en Russie de larges groupes de petits bourgeois,et on y trouvait aussi un prolétariat,mais un prolétariat qui s’était formé dans un passé récent et qui dans toute la population ne formait qu’une petite minorité,et n’avait pas encore perdu ses liaisons avec les campagnes. Le prolétariat russe différait du prolétariat de l’ Europe occidentale dans la mesure semblable du capitalisme russe différant des systèmes de production des bords du Rhin et de la Mer du Nord. Dans l’industrie russe subsistaient des vestiges importants de la servitude et on pouvait à peine dire que l’ouvrier russe était » un ouvrier salarié libre au sens du marxisme. C’était la tâche économique de la révolution russe d’abolir le servage des paysans dans l’agriculture et de créer une vraie classe d’ouvriers salariés semblable à celle de l’Ouest,et celui de briser toutes les chaînes qui empêchaient le développement de l’industrie capitaliste. Dans le domaine politique par conséquent,il fallait la libération des États féodaux et la création d’un appareil d’ État qui garantisse la solution politique du problème économique. En un mot, le problème de la révolution russe était le problème de la révolution bourgeoise et les bolchévistes ne l’ont jamais nié.

Mais cette révolution bourgeoise ne pouvait se réaliser sous la forme classique de la révolution française de I789.Il en était autrement qu’en France où la bourgeoisie (on se rappelle les paroles orgueilleuses de 1’abbé Sieyés) montrait une conscience développée; la bourgeoisie russe était liée par bien des manières à l’ancien régime et ne pouvait penser à une résistance sérieuse aux situations existantes. Par suite la révolution. qui s’approchait de plus en plus trouvait son principal soutien chez les paysans, les ouvriers, les intellectuels qui voyaient leur liberté de conscience limitée par le régime des Romanoff. Ces intellectuels trouvaient, comme si souvent dans 1 ‘histoire, les armes nécessaires à leurs luttes à l’étranger; mais les théories qu’ils empruntaient, le marxisme, était né à l’ étranger par suite d’une réalité sociale qui différait complètement de la réalité sociale russe. Tout cela eu des conséquences bien singulières.
Parce qu’on abordait des pensées qui n’étaient pas le fait de la réalité russe,il fallait concilier les théories étrangères avec cette réalité. Il fallait partiellement faire violence à la réalité, et d’ autre part, on se voyait obligé d’adapter la théorie étrangère à la réalité historique. En ceci, réside les causes de l’interprétation bolchéviste, de l’interprétation léniniste du marxisme.

L »intellectuel révolutionnaire russe voyait très clairement que les paysans russes formaient par leur nombre 1a couche sociale qui dans la révolution ‘prochaine jouerait le rôle le plus important. Mais le marxisme leur disait que, comme le formulait Lénine « seulement le prolétariat par suite de son rôle économique dans l’industrie était capable de conduire toutes les masses travailleuses et opprimées qui, il est vrai, étaient souvent plus opprimées que les prolétaires,mais ne pouvaient pas combattre d’une façon indépendante pour leur libération. » Lénine ajoutait:

« Alors que la bourgeoisie fait. éclater les paysans et toutes les couches petite-bourgeoises,le prolétariat les unit et les organise. »

 »Pour être vraiment révolutionnaire,dit Lénine;il faut que la démocratie de la Russie actuelle marche de concert avec le prolétariat et qu’ elle soutienne les luttes du prolétariat la seule classe qui reste révolutionnaire jusqu’au bout. » (24)
Dans un autre passage il dit:

« Par conséquent,la révolution bourgeoise de !905-!907, sans avoir remporté des succès aussi éclatants que ceux qui échurent de temps à autre aux révolutions portugaises et turque,a été sans conteste une révolution vraiment populaire. Car la masse du peuple,sa majorité,ses couches
sociales inférieures 1es plus profondes acculées sous le joug de l’exploitation, se sont dressées d’elles-mêmes,elles ont laissé sur tout le cours de la révolution l’emprise de leurs revendications,de leurs tentatives de construire à leur manière une société nouvelles à la place de l’ancienne qu’elles détruisent  » ( 25)

Il faut ne regarder que l’analogie avec ce qu’on appelait en 1848 « la mobilisation du peuple » pour voir très distinctement pourquoi les bolchévistes ne partaient pas du marxisme de I87I, mais du marxisme du « Manifeste ». Dans cet écrit,ils trouvaient des opinions sur la tâche du prolétariat au mémento où la révolution bourgeoise n’avait pas encore eu lieu. Ils y trouvaient une conception de la démocratie qui cadrait bien avec les situations russes où l’al1iance . entre les trois groupes vraiment révolutionnaires aspirait aussi au pouvoir révolutionnaire du peuple.
Lorsque Lénine comparait les sociaux révolutionnaires et les menchévistes russes avec les démocrates petits-bourgeois français du type Louis Blanc, il avait plus raison qu’il ne le pensait lui-même.
Le parallèle est tellement juste qu’on peut le poursuivre, et qu’on peut comparer les bolchévistes aux communistes de I848. Ce qu’ils faisaient eux-.mêmes est prouvé par le fait qu’on retrouve chez eux ; non seulement des conceptions comme « la démocratie révolutionnaire et la révolution populaire » mais aussi par exemple chez Trotsky la terminologie de la révolution permanente. La. conception de jeunesse de Marx et Engels selon laquelle « la conquête de la démocratie » n’ était que le premier pas dans la révolution ouvrière était partagée par les bolchévistes, et leur politique en I9I7 tendait à la réalisation de cette conception.
En I848, cette conception du jeune Marx se révélait une illusion; en I9I7 la même chose se révélait pour la seconde fois, l’histoire se répétait mais sous une autre forme. Ni la révolution de 1848 en France, ni la révolution d’octobre n’ont réalisé la libération du prolétariat.
Quant aux bolchévistes, Trotsky joua d’abord avec l’insurrection de: Kronstadt le rôle de Cavaignac qui écrasa en 1848 les ouvriers révoltés. Plus tard,le sort de Trotsky fut le même que celui de Louis Blanc qui, loin du lieu où il avait exercé autrefois le pouvoir écrivit·· des livres magnifiques sur 1′ ‘histoire qu’il avait aidé à faire lui-même. Et ce fut Staline qui fut l’héritier d’ 0ctobre, comme en France, Louis Bonaparte avide de pouvoir s’empara de 1’héritage de la révolution de I848. Mais ni l’un ni l’autre de ces développements ne signifie la faillite du marxisme.

Brendel Cajo

NOTES

(I) Le socialiste autrichien Max Adler, mort en I938,s’est bien aperçu de cette contradiction . que 11on ne retrouve par suite dans aucun de ses ouvrages. Pourtant,lui aussi a sur la révolution sociale des opinions n’allant pas au-delà du « Manifeste Communiste »
(2) :Marx-La. lutte ·des ·classes en France-Editions sociales internationales-Paris I936-p.42 et’59
(3)Marx-Lettre·à Kugelmann-Editions sociales internationales-Paris 1936-p 42 et 59
(4) État et révolution-Editions sociales-Paris !947
(5) État et révolution,op.cit.p.27
(6) État et révolution,op.cit.p.26-27
(7) État et révolution;op.cit.p.28-29
(8)-État et révolution,op.cit.p.28
( 9) Waldeck-Rousseau, politicien français radical (1846-1904)
(I0) ‘État et révolution,op.cit.p.35
.(II). État et révolution,op.cit.p.30-3I
{!2) Marx-Le capital.
(I3) Max Adler-La conception marxiste de l’État-Die Staatssauffassung Marxism-Marx Sudien- IV Bund 2-Wènen !922-btz 33 Engels-Origine de la famille (p.I40)
(I4) Engels-Anti-Dühring-Editions Costes-Paris ~946-II,p.46-47
(15) État et révolution,op.cit
(I6) État et révolution,op.cit.p.89
(I7) Marx-Misère de la philosophie, Editions sociales,Paris I937,p.III
(!8) Marx;Défense devant les .jurés de Cologne en I849.
(19) État et révolution,op.cit.p,89
(20) Engels dit très bien que le changement des moyens de production en propriété commune est mortel pour 1’Etat bourgeois. Il dit aussi :
« Car avec la transformation des moyens de production en propriété sociale le disparaissent aussi le salariat et le prolétariat… « Origines de la famille »-Ed.Costes I946,p.8I

(2I) « État et Révolution »,op.cit.
(22) « État et Révolution »,op.cit.
(23) Lénine-« Une des questions « principale de la révolution » p.I78
(24) Lénine-« La catastrophe qui vient » p.240

« L’ordre règne à Varsovie ! », « l’ordre règne à Paris ! », « l’ordre règne à Berlin ! ». C’ est ainsi que les proclamations des gardiens de « l’ordre » à travers les armées se répandent d’un centre à l’ autre de la lutte historique mondiale. Et la jubilation des vainqueurs ne remarque pas qu’un « ordre », doit périodiquement etre maintenu par des boucheries sanglantes , va sans arrêt vers sa destinée historique, vers sa fin. »
Rosa Luxembourg: « L’ordre règne à Berlin. » (dernier écrit-I4 janvier I9I9)

 


	
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