Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
SPARTACUS
Archives
Derniers commentaires
24 décembre 2016

INFOBREF N°471 spécial armement guerres

INFOBREF N°471

spécial armement guerres

Trump et Wall Street : anticipations positives pour le secteur de l’armement

 23 Novembre 2016-Les électeurs américains nous ont-ils évité une Troisième Guerre mondiale, comme le suggèrent certains médias russes ? Selon Sergueï Glazyev, proche conseiller du président Vladimir Poutine, mais aussi économiste reconnu, les Américains avaient objectivement deux choix : la guerre, ou consentir à un monde multipolaire. Hillary Clinton symbolisait le premier, tandis que Donald Trump donnait une chance à un changement de trajectoire dans les relations russo-américaines[1].

Si l’on pouvait se réjouir ne serait-ce que d’une seule conséquence positive de l’élection du candidat républicain à la présidence des États-Unis, ce pourrait être celle-là : l’espoir d’une remise à zéro des relations et l’instauration d’un dialogue constructif entre Moscou et Washington.

Et si une seule fois l’arrogance de Donald Trump pouvait faire taire les va-t-en-guerre impénitents, ce devrait être pour tancer l’ex-secrétaire-général de l’OTAN Anders Fogh Rasmussen qui crut bon d’avertir le président élu qu’un manque de fermeté avec Vladimir Poutine sonnerait le « début de le fin » pour l’organisation atlantique[2]. Rasmussen sait bien entendu où sont ses intérêts, puisqu’il est depuis mai 2016 conseiller du président ukrainien Petro Poroshenko[3]. Ses journées chez Goldman Sachs, où il officie aussi depuis août 2015[4], lui laissent apparemment quelques temps libres…

Au lendemain de l’élection du trublion républicain, ce n’est pourtant pas à un monde en voie d’apaisement que semblaient croire les marchés financiers. Parmi les flux d’informations populistes, mensongères, et contradictoires qui ont alimenté sa campagne, les investisseurs ont fait leurs choix et signalé leurs attentes.

Surprise sur les marchés

Les places financières ont réagi de manières dispersées au lendemain de l’annonce de la victoire de Donald Trump. Les Asiatiques ont dévissé : plus de 5% de perte pour les indices Nikkei à Tokyo et Hang Seng à Hong Kong.

Les Européennes ont joué les indifférentes, oscillant entre -0,4% à Madrid et +1,99% à Zurich, le BEL20 et le CAC40 s’appréciant de respectivement +1,42% et +1,49%. C’est contre toute attente la réaction des marchés américains qui aura surpris tout le monde.

Alors qu’ils vivaient dans la crainte d’une stagflation, d’une guerre commerciale avec la Chine, et de la politique isolationniste de Donald Trump, plongeant dans le rouge à chaque sondage favorable à l’homme d’affaires, l’élimination inattendue d’Hillary Clinton aura finalement donné tort à toutes les analyses et toutes les prévisions.

Non seulement Wall Street n’a pas enregistré les reculs prédits par les observateurs, mais a enchainé les hausses. Au lendemain de l’élection, l’indice total du marché américain Dow Jones Wilshire 5000 (noté W5000) clôturait en hausse de 1,41%, l’indice des 30 « blue chips » américaines Dow Jones Industrial Average (noté DJI) gagnait 1,40%, tandis que l’indice des valeurs technologiques Nasdaq (noté IXIC) se contentait d’un gain de 1,11%. Deux semaines après l’élection (22 novembre), les gains enregistrés depuis le 8 novembre s’établissent à respectivement +4,13%, +3,77% et +3,71% pour ces trois indices.

Certes, dans le même temps l’or tenait bien son rôle de valeur refuge en s’appréciant de plus de 5%, signe que les investisseurs ne partageaient pas tous le même optimisme. Mais à y regarder de plus près, la vraie valeur refuge n’est peut-être pas celle que l’on croit.

Mieux que l’or…

Le New York Stock Exchange Arca Defense Index (noté DFI, en rouge sur le graphique) est un indice de secteur composé de 26 firmes parmi les plus représentatives de l’industrie de l’armement aux États-Unis, dont les « Big 6 » (Lockheed Martin, Boeing, Raytheon, General Dynamics, Northrop Grumman et L-3 Communication). Établi avec valeur de référence de 500 points le 28 septembre 2001 – quelques jours après les attentats, ce qui n’est pas un hasard – il atteint 3 776,70 points le 22 novembre 2016, ce qui correspond à une appréciation de 655% depuis sa création quinze ans plus tôt.

Le 9 novembre 2016, à la fermeture de Wall Street, l’effet Trump a propulsé l’indice de l’armement DFI à +6,49% en une seule séance[5]. Et la hausse s’est poursuivie, fixant la plus-value à 15,05% deux semaines plus tard (22 novembre).

Ce n’est pourtant pas réellement une surprise. Les comparaisons entre les indices ont souvent démontré[6] que, dopées par un enchainement d’effets d’aubaine – krach de la nouvelle économie au printemps 2000, attentats du 11 septembre 2001, guerre en Irak en 2003, crise financière en 2008 – les valeurs de l’armement avaient entamé le 21e siècle dans l’euphorie, surperformant toujours de façon spectaculaire les indices généraux de référence sur longue période. Le secteur de l’armement est incontestablement une valeur de long terme, voire même une valeur refuge lorsque s’effondrent d’autres pans de l’économie, en période d’incertitude, et lorsque résonnent les bruits de bottes.

 
Évolution des indices boursiers, 24 octobre – 22 novembre 2016. Sources : historiques des cours NYSE

Des guerres prometteuses…

Car cela faisait un moment déjà, bien avant l’élection de Donald Trump, que le secteur de l’armement, galvanisé par les propos de certains de ses dirigeants, ne dissimulait plus son optimisme et observait le climat de guerre qui s’installe avec une certaine délectation.

Réunis début décembre 2015 à West Palm Beach en Floride, dans le cadre de la « Third Annual Industrials Conference » organisée à l’initiative du Crédit Suisse, les principaux groupes du secteur de l’armement aux États-Unis avaient tenu à rassurer leurs actionnaires quant aux bénéfices attendus de l’escalade des conflits au Moyen-Orient[7].

Bruce Tanner, vice-président de Lockheed Martin, a souligné les « bénéfices indirects » de la guerre en Syrie. Citant le Su-24 russe abattu en Syrie par la Turquie le 27 novembre 2015, il a souligné que cet incident augmentait les risques pour les militaires américains dans la région, offrant à Lockheed Martin « un ascenseur immatériel en raison de la dynamique de cet environnement », une démonstration des besoins en avions F-22 et F-35, et un accroissement de la demande en « consommables » tels que les roquettes.

Le CEO de Raytheon, Tom Kennedy, évoquant sa rencontre avec le roi Salman d’Arabie saoudite, s’est également montré très confiant dans la hausse significative des ventes de « solutions de défense » à plusieurs pays de la région.

C’est aussi l’analyse du bureau d’audit Deloitte dans la livrée 2016 de son rapport Global aerospace and defense sector outlook, intitulé Poised for a rebound (« Prêts à rebondir »). Énumérant les principaux conflits et menaces – tensions en mers de Chine du Sud et de l’Est, Corée du Nord, Ukraine et Russie, l’État islamique au Moyen-Orient, ainsi que les attaques terroristes, les analystes de Deloitte notent que « pour les entreprises de la défense, ceci représente une opportunité de vendre plus d’équipement et de systèmes d’armes » et que, par conséquent, « un retour à la croissance » est à anticiper[8].

… et un programme présidentiel alléchant

En termes constants, les dépenses militaires des États-Unis ont diminué chaque année sans exception pendant la présidence Obama, accusant une baisse globale de 19,3% entre leur sommet de 2010 (héritage de Georges W. Bush) et 2015. Quelque soit le président élu, il était donc peu vraisemblable que cette baisse se prolonge encore, et les milieux d’affaires ont, comme nous l’avons vu, la conviction du contraire.

Le « Plan to Upgrade America’s Military » du futur occupant de la Maison Blanche ne pouvait que les conforter dans cette opinion. Le président élu s’est en effet fixé des objectifs ambitieux pour renforcer l’appareil militaire dont il n’a cessé de dénoncer les faiblesses durant sa campagne. Constatant que l’U.S. Army a perdu 21% de ses effectifs depuis 2012, il a promis de relever l’effectif à 540 000 soldats. L’U.S. Navy serait doté de 350 bâtiments, au lieu des 272 actuels. « Upgrade » aussi pour l’U.S. Air Force qui pourrait compter sur 1 200 avions de chasse avec Donald Trump commandant en chef.

Le financement de ce vaste programme de réarmement est encore un mystère, et cela d’autant plus que les gouffres budgétaires que sont la modernisation de l’arsenal nucléaire et les grands programmes – tels que les avions-ravitailleurs KC-46, et bien entendu l’avion multirôles F-35 – ne semblent pas remis en question pour l’instant. Chacun sait donc qu’il y aura de la marge entre les effets d’annonce de Trump pendant sa campagne et le pragmatisme dont il devrait faire preuve une fois dans le Bureau ovale. Mais tout concoure à rendre le sourire aux industriels de l’armement, y compris les menaces de Trump de sortir de l’OTAN, si les alliés des États-Unis au sein de l’Alliance atlantique – c’est-à-dire nous – ne sont pas prêts à payer davantage pour assurer leur propre sécurité. Si l’isolationnisme revendiqué par Donald Trump devait conduire à un renforcement des capacités militaires de l’Union européenne, c’est encore les grands groupes de l’armement des États-Unis qui en retireraient les principaux bénéfices.

Une économie de guerre permanente

L’hypothèse que nous soutenons depuis plusieurs années[9], selon laquelle les « marchés » internalisent dans leur comportement l’inéluctabilité des guerres et la croissance sans fin du secteur de l’armement, se vérifie. La finance a définitivement intégré le concept d’une « économie de guerre permanente » développé par l’économiste Seymour Melman dans les années 1970 et 80[10]. Ce comportement des investisseurs ne repose pas sur un mimétisme autoréférentiel comme on a pu le connaitre dans les années 1990 autour des valeurs technologiques du Nasdaq, avec pour conséquence l’éclatement de la bulle au printemps 2000. Il repose au contraire sur des fondamentaux solides tels que la pérennité de la fonction militaire, une croissance inévitable des dépenses militaires dans les économies émergentes et probablement dans l’Union européenne, l’élargissement des marchés de la sécurité nationale et de la surveillance des frontières, et bien entendu la persistance des conflits et foyers de tension dans de nombreux endroits de la planète. Plus que jamais, quand le canon tonne, le rentier chantonne…


L’auteur

Luc Mampaey est le directeur du GRIP, docteur en sciences économiques, ingénieur commercial et titulaire d’une maîtrise en gestion de l’environnement. Il est également maitre de conférence à l’Université Libre de Bruxelles.


[1].Советник Путина предсказал перезагрузку отношений между США и Россией (Le Conseiller de Poutine prédit un reset des relations États-Unis-Russie), Lenta.ru ,9 novembre 2016.

[4]. Pierre Rimbert, Le sens du placement, Le Monde diplomatique, septembre 2015.

[5]. Un record pour une seule séance, battu a seulement deux reprises depuis l’établissement de l’indice le 28 septembre 2001 : +7,50% le 13 octobre 2008 et +10,82% le 28 octobre 2008, en pleine turbulence de la crise financière.

[6]. Voir notamment la dernière édition de Dépenses militaires, production et transferts d’armes - Compendium 2016, Rapport du GRIP 2016/8.

[7]. Lee FangZaid Jilani, Defense Contractors Cite “Benefits” of Escalating Conflicts in the Middle East, The Intercept, 4 décembre 2015.

[9]. Luc Mampaey et Claude Serfati, «Armaments groups and the financial markets: an ‘unlimited warfare’ convention in the making? », dans Arms, War, and Terrorism in the Global Economy, Wolfram Esner (ed.), Bremer Schriften zur Konversion, Band 13, 2007, p. 121-147.

[10]. Lire, parmi d’autres ouvrages de Seymour Melman: Pentagon Capitalism, The Political Economy of War, McGraw-Hill Book Company, New York, 1970, et The Permanent War Economy, American Capitalism in Decline, Simon & Schuster Inc., New York, 1985.



 

Irak: nouvelle frappe US «par erreur», 90 morts, 100 blessés

10-12-2016-Après avoir bombardé l’armée gouvernementale syrienne en septembre, l’armée américaine se trompe une fois de plus, cette fois en Irak. Faut-il s’attendre à une nouvelle vague de désinformation aux dépens de l’armée russe pour faire oublier cet incident?

Une nouvelle bourde de l’armée de l’air américaine à Mossoul a coûté la vie à 90 soldats irakiens, environ 100 militaires ont été blessés, déclare le portail d’information irakien Factiniraq. Bouthaina Shaaban © REUTERS/ Khaled al-Hariri Conseillère d’Assad: «Erreur US? Mon œil!» Interrogée par Sputnik, une source dans l’armée irakienne a confirmé cette information. La frappe qui a eu lieu vendredi visait un groupe de véhicules blindés et a détruit huit véhicules d’infanterie et quatre camions militaires Humvee. L’opération visant à libérer la ville de Mossoul des djihadistes du groupe État islamique (Daech) se poursuit depuis le 17 octobre. Outre les militaires de l’armée gouvernementale, elle réunit des combattants kurdes Pechmerga et les forces de la coalition occidentale dirigée par les États-Unis. Ce n’est pas le premier cas de ce genre durant la campagne militaire américain contre le groupe islamique au Proche Orient. Hossein Amir-Abdollahian © AFP 2016 STR «Les USA font tout pour affaiblir la Syrie et renforcer les terroristes» Le 17 septembre, quatre avions de la coalition internationale anti-Daech (deux F-16 et deux A-10) avaient réalisé quatre frappes contre les forces de l'armée syrienne régulière, encerclées dans la région de Der-ez-Zor par les extrémistes de Daech. Le raid aérien avait coûté la vie à 62 militaires et avait fait une centaine de blessés. En outre, l’armée syrienne avait perdu près de 20 unités de matériel militaire. Les États-Unis ont par la suite confirmé avoir effectué ce raid. Selon la partie américaine, des données erronées auraient été à l'origine de la frappe. Par ailleurs, les États-Unis ont trouvé un moyen efficace de détourner l’attention de la communauté internationale de leurs erreurs fatales. Les Américains et leurs alliés accusent la Russie de bombarder régulièrement des quartiers « civils » ou les positions de l’« opposition modérée », qui ne sont rien d’autres que des groupes terroristes, comme c’était le cas à Alep. Reste à voir quel nouveau fake sera utilisé par l’administration américaine sortante pour se dédouaner suite à l’incident de vendredi. Suivez Sputnik sur Telegram pour ne jamais manquer les actualités les plus importantes grâce à nos sélections du matin et du soir. Pour recevoir les actualités de notre chaîne, il suffit de télécharger l’application Telegram sur n’importe quel smartphone, tablette ou ordinateur puis cliquer sur le lien et appuyer sur « Join ».

En savoir plus:

Conseillère d’Assad: «Erreur US? Mon œil!»

 «Les USA font tout pour affaiblir la Syrie et renforcer les terroristes»

https://fr.sputniknews.com/international/201609191027819581-usa-syrie-terrorisme/

 Vente d'armes : pourquoi la France devient incontournable

En signant mardi un contrat d'armement record avec l'Australie, la France confirme son statut de troisième exportateur mondial dans ce secteur. Le fruit d'un savoir-faire et d'une conjoncture propice.

 

La France a signé un contrat de vente de 12 sous-marins Barracuda à l'Australie.

La France a signé un contrat de vente de 12 sous-marins Barracuda à l'Australie. (Reuters)

"Une reconnaissance de la puissance de la France, de sa dimension mondiale." Au lendemain de la signature du "contrat du siècle" scellant la vente de 12 sous-marins à l'Australie pour 34 milliards d'euros, Jean-Yves Le Drian peut se féliciter d'avoir été au coeur du plus gros contrat jamais conclu entre la France et un pays étranger. Une bonne nouvelle qui pourrait permettre la création de 3.000 à 4.000 emplois pérennes, selon le ministre de l'Economie.

Des ventes en progression constante depuis 2012

Que ce soient des hélicoptères, des avions de chasse Rafale ou des chars Leclerc, la France exporte ses armes depuis longtemps et de plus en plus depuis 2012. Alors que le montant des exportations s'est élevé à 4,8 milliards d'euros l'année de l'élection de François Hollande, elles ont atteint 16 milliards l'an dernier et ce chiffre a déjà plus que doublé pour 2016 avec l'annonce du contrat passé avec l'Australie mardi. "Jean-Yves Le Drian n'a pas ménagé sa peine. Il est tout le temps en voyage et c'est pour la bonne cause", a félicité François Hollande, conscient que son ministre s'était mué en véritable VRP de l'armement français ces dernières années.

Le savoir-faire, l'euro et la géopolitique pour expliquer cette tendance

Spécialiste de la géopolitique, Bruno Tertrais évoque dans Libération "la qualité de l'offre" française en matière d'armement. La France se classe aujourd'hui troisième sur le podium des plus gros exportateurs d'armes, derrière les Etats-Unis et la Russie. La hausse depuis 2012 de ses ventes est aussi le fruit d'une conjoncture particulièrement bénéfique, entre un cours de l'euro bas et une géopolitique marquée par l'intensification des tensions au Moyen-Orient notamment. C'est déjà de cette région que provenait plus d'une commande sur trois entre 2010 et 2014. La France peut en effet y apparaître comme un suppléant de choix pour les pays fâchés contre les Etats-Unis", explique Bruno Tertrais, qui prend l'exemple de l'Arabie Saoudite.

Les pays arabes comme partenaires principaux

En 2014, l'Arabie Saoudite est devenue le premier importateur mondial d'équipements militaires. Pas étonnant que le royaume wahhabite soit le premier client de la France sur la période 2010-2014. Mais Paris dispose d'autres partenaires dans la région, eux aussi peu connus pour leur respect des droits de l'Homme. En mai 2015, l'armée qatarie a passé commande de 24 avions de combat Rafale pour 6,3 milliards d'euros. En février 2015, après des années d'insuccès, Dassaut Aviation a signé des contrats export pour 24 Rafale avec Le Caire ainsi qu'une frégate multimissions pour un montant de 5,2 milliards d'euros.

Des contrats à finaliser et quelques risques à l'avenir

L'Inde a conclu en janvier 2016 un accord avec la France pour l'acquisition de 36 Rafale, mais les négociations sur ce contrat estimé à plus de 5 milliards d'euros achoppent sur le prix et le niveau de sophistication des appareils, ainsi que sur le montant des investissements sur le sol indien. Même chose pour un important contrat passé avec le Liban (2,2 milliards d'euros), aujourd'hui à l'arrêt en attente d'un don promis par l'Arabie Saoudite. En avril 2015, la Pologne s'est engagée pour l'achat de 50 hélicoptères multirôle européens Caracal d'Airbus, estimés à plus de 3 milliards d'euros. Les contrats définitifs n'ont toutefois pas été signés et la nouvelle majorité conservatrice critique le choix d'Airbus, au nom du soutien aux usines polonaises de défense.

Outre les enjeux géopolitiques et le cours des monnaies, d'autres risques pèsent sur l'avenir de l'industrie française de l'armement : le cours du baril de pétrole notamment. Certains pays "risquent de devoir réduire leurs dépenses ou étaler leurs commandes", assure Bruno Tertrais. Des pays du Golfe en particulier, les principaux clients de la France.

Thomas Liabot – leJDD.fr mercredi 27 avril 2016

ALEP : TROIS BATAILLES DANS LA BATAILLE…
par Richard Labévière

Richard Labévière, né à Thonon-les-Bains le 4 mai 1958, est un journaliste et écrivain français qui a été rédacteur en chef à la Télévision suisse romande et à Radio France internationale. Wikipédia

L’envers des cartes samedi 10 septembre 2016,

Des forces spéciales des USA sont présentes en Syrie

ALEP : TROIS BATAILLES DANS LA BATAILLE…

La mère des batailles qui fait rage à Alep, et quel qu’en soit l’issue, n’annonce pas pour autant la fin de l’organisation Etat islamique (Dae’ch), ni des autres groupes terroristes de l’islam radical, mais plutôt un tournant majeur : celui de l’après-Dae’ch, à savoir de nouveaux théâtres de jihad. Une reconquête d’Alep par l’armée gouvernementale syrienne et ses alliés accélérera, sans doute, la reprise de Raqqa en Syrie, puis de Mossoul en Irak. Les quelques 30 000 mercenaires jihadistes étrangers ont déjà intégré ce scénario et préparé leur repli en bon ordre dans différents sanctuaires du Caucase, d’Afghanistan et du Nord-Ouest chinois. Ils continueront à utiliser le « hub » turco-méditerranéen pour menacer l’Europe et entretenir des complicités rhizomatiques en Asie, dans la Corne de l’Afrique et dans la bande sahélo-saharienne.

D’autres loups solitaires ou en meute s’inspireront de ce redéploiement pour frapper ici ou là, selon des modes opératoires variés. Leurs deux filiations idéologiques principales – wahhabisme et weltanschauung des Frères musulmans – continueront à inspirer leurs attentats. L’Arabie saoudite et d’autres pétromonarchies continueront à financer recrutement, formation et assurance-vie des familles de leurs « martyrs ». Initiée par les Etats-Unis dans les années 1980, cette politique d’« instabilité constructive » continuera, outre le Loyen-Orient, à cibler la Russie, la Chine et l’Europe… L’éradication « officielle » de Dae’ch changera tout pour que rien ne change…

Au-delà des percées et des replis de la rébellion syrienne, l’enjeu géopolitique le plus large de la bataille d’Alep met en confrontation deux cartographies incompatibles : celle d’un nouveau Sykes-Picot, autrement dit le « Grand-Moyen-Orient » de George W. Bush et Condoleezza Rice – que les deux administrations Obama ont recyclé avec quelques nuances – et celle d’une réaffirmation des Etats-nations arabo-persiques issus du démantèlement de l’empire ottoman.

La première cherche à démanteler les Etats-nations pour les fragmenter en micro-Etats (type Kosovo ou Soudan du Sud), voire pour les re-tribaliser en autant de petits émirats sunnites, chi’ites, druzes, kurdes, etc. selon la bonne vieille recette des imperium (de Rome à l’Hyper-puissance américaine). A l’image ce de qui a été fait en Irak et en Libye, Washington, ses satellites européens, les pétromonarchies du Golfe, Ankara et Tel-Aviv exigent toujours le départ de Bachar al-Assad pour démanteler la Syrie en deux émirats sunnites (Alep et Damas), un micro-Etat druze sur le Golan et un réduit alaouite dans les montagnes qui dominent Lattaquié et Tartous.

La deuxième refuse cette logique de fragmentation, estimant que des Etats nationaux souverains constituent les « monades » essentielles pour résister à l’instauration de cette cartographie d’une mondialisation d’inspiration anglo-saxonne néo-libérale. En effet, les prédateurs de Wall-Street, de la City et de Bruxelles cultivent la même sainte horreur de souverainetés nationales empêcheuses d’exploiter en rond… Moscou (dans une moindre mesure Pékin), Téhéran, Damas, le Hezbollah libanais et plusieurs organisations palestiniennes misent toujours sur la défense et l’affirmation du fait national afin de garantir un monde multipolaire, ultime riposte à la World-company que Washington veut imposer à toute la planète, sous prétexte de « droits de l’homme » et de liberté du commerce.

C’est la première bataille d’Alep : celle d’une armée nationale syrienne qui travaille à reconquérir la totalité de son territoire national contre les hordes de jihadistes, mercenaires serviles de la mondialisation anglo-saxone. Sur ce front, on voit converger Dae’ch et d’autres groupes terroristes dont Jabhat al-Nosra (Al-Qaïda en Syrie), remisant la fiction des « rebelles modérés, laïcs, sinon démocratiques » au rayon des illusions occidentales. A cet égard, Bouthaïna Chabaane, la conseillère de Bachar al-Assad a eu amplement raison d’affirmer dernièrement sur le plateau de la chaine de télévision libanaise Al-Mayadeen, que « la bataille d’Alep démasquait au grand jour les mensonges de la diplomatie occidentale ».

C’est la deuxième bataille d’Alep qui entérine la suprématie des groupes salafo-jihadistes sur les autres composantes de la rébellion syrienne (Armée syrienne libre et compagnies…). Sous-chef opérations de l’état-major des armées françaises, le général Didier Castres affirmait le 16 décembre 2015 devant la Commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat qu’il fallait en finir avec le « mythe des rebelles syriens modérés ». Loin de partager la même lucidité, les stratèges du Pentagone ont alors forcé la main des terroristes de Jabhat al-Nosra pour qu’ils annoncent, conférences de presse à l’appui, l’abandon de leur allégeance à Al-Qaïda. Ce tour de passe-passe de pure communication (l’ex-Nosra s’appelle désormais Fatah al-Cham), qui n’a trompé personne, était surtout destiné à permettre au Congrès américain de voter de nouveaux crédits à une rébellion d’apparence désormais plus respectable.

Et pour faire bonne mesure, un général saoudien rendait dernièrement visite à ses homologues israéliens pour coordonner l’appui logistique aux « nouveaux jihadistes de la liberté ». De leur côté, les forces spéciales turques et européennes (françaises notamment) pouvaient poursuivre leurs livraisons de matériels aux autres groupes terroristes réunis au sein de Fatah al-Cham. Se répètent ainsi les mêmes erreurs commises au Kosovo, lorsque plusieurs services européens (dont le service-action de la DGSE) armaient de pied en cap l’UCK1 du criminel de guerre Hashim Thaci qui deviendra Premier ministre du Kosovo…

Sur le terrain, les groupes salafo-jihadistes mènent depuis plusieurs semaines des opérations dans les quartiers du sud-ouest d’Alep. Ils ont réussi à s’infiltrer dans la localité de Ramousseh sans pour autant prendre le contrôle de l’est de la ville, essuyant de lourdes pertes. A l’ouest, le Hezbollah libanais a engagé une force spéciale dite « bataillon Rezwan » dans la région d’al-Hamadaniyeh. Cette contre-offensive a été suivie d’un autre déploiement, celui de 2 000 combattants de Al-Nojaba d’Irak. Les forces de ce bataillon ont déjà participé à la libération de certaines localités du Rif d’Alep. Des sources syriennes affirment que la bataille intense que mènent les terroristes vise à libérer les officiers de liaison turcs et occidentaux dont des français pris au piège à l’est d’Alep.

Selon le journal libanais As-Safir, citant des sources militaires syriennes, les Turcs ont dépêché l’une de leurs meilleures unités lors de la deuxième vague de l’attaque pour briser le blocus d’Alep. Elle comptait dans ses rangs des forces du Hizb al-turkestani al-islami et des Ouïghours, jihadistes chinois. Ces derniers éléments ont formé le gros lot des kamikazes qui ont lancé une attaque simultanée en provenance de l’ouest, au moment où les blindés syriens opéraient leur percée.

Les kamikazes chinois Ouighour2 rattachés au Parti islamique du Turkestan jouent un rôle déterminant dans cette deuxième bataille. Ils ont été redéployés du nord de Hama vers le sud d’Alep. Ils se sont fait exploser par dizaines (près d’une soixantaine) durant les deux premiers jours de l’offensive aux portes des complexes militaires du quartier de Ramoussa. Jabhat al-Nosra a pris le relais. « Ce qui est assez paradoxal est de voir ces brigades ouighour, tchètchènes, ouzbèques, ainsi que les jihadistes saoudiens figurer aujourd’hui parmi ceux que la presse occidentale s’obstine à nommer « rebelles modérés », explique un officier français de renseignement ; « sans parler du chef du Conseil islamique d’Alep, le saoudien Abdallah Mohaycini qui s’est imposé comme l’un des leaders incontestés de ces « modérés » promettant 72 vierges aux jihadistes s’ils réussissaient à briser le siège. On le voit dans une vidéo en train de galvaniser les jihadistes en décrivant la sensualité des vierges du paradis… »

Un autre fait capital n’a pas non plus été relayé par la presse occidentale : de généreux bailleurs de fonds saoudiens (encore eux !) assurent de substantiels versements aux familles des kamikazes ouighours par l’intermédiaire de plusieurs banques installées au Koweït.

Mais c’est une troisième bataille, elle-aussi occultée par les grands médias mainstream, qui pourrait s’imposer comme l’enjeu crucial des affrontements d’Alep : celle qui opposent désormais les forces kurdes à l’armée syrienne. Jusqu’à récemment, les Kurdes de Syrie (du PYD, aile syrienne du PKK – Parti des travailleurs du Kurdistan principalement basé en Turquie) observaient une certaine neutralité vis-à-vis de Damas, escomptant un statut d’autonomie au sein de la Syrie historique. Misant non seulement sur les jihadistes d’ex-Nosra, Washington a décidé de jouer aussi la carte kurde afin de prendre à revers les avancées de l’armée syrienne en direction d’Alep.

Pour répondre aux opérations aériennes russes qui s’effectuent désormais aussi à partir de bases iraniennes, la chasse américaine est intervenue dans la région d’Hassaké (au nord-est de la Syrie) pour appuyer la progression des forces kurdes. Des agents de liaison américains ont été identifiés également dans le Kurdistan d’Iran aux côtés d’activistes du PJAK (l’aile iranienne du PKK) ayant mené plusieurs opérations contre des convois de ravitaillement destinés aux Pasdarans engagés aux côtés de l’armée syrienne. Washington a même annoncé vouloir instaurer une « no-flying zone » dans cette partie de la Syrie. Parallèlement, les services israéliens redoublent d’activité aux côtés des organisations du Kurdistan d’Irak, qui malgré des divergences passées avec les Kurdes de Syrie, leur offrent désormais la profondeur stratégique nécessaire à la consolidation d’un front autonome à l’est d’Alep.

Quelles nouvelles promesses les Etats-Unis ont-ils fait aux organisations kurdes d’Iran, d’Irak, de Syrie et de Turquie ? A n’en pas douter, estiment plusieurs officiers européens de renseignement en poste dans la région, ce nouveau soutien américain massif (appuis aériens, matériels, encadrement et renseignement) aux différentes factions kurdes vise trois objectifs : empêcher la reconquête d’Alep par l’armée syrienne ; contenir la dérive militaire turque post-coup d’Etat ; et enfin, ouvrir une nouvelle guerre asymétrique dans le Kurdistan iranien.

Et, concluent les mêmes sources, cette troisième bataille d’Alep pourrait être la plus décisive afin de permettre une nouvelle partition ethnico-confessionnelle de la Syrie qui ne pourra pas être assurée par les seuls jihadistes soit disant modérés, laïcs et démocratiques… Cette troisième bataille d’Alep, de tous contre tous, ne va certainement pas favoriser les négociations de Genève ni un proche retour à la paix.

Richard Labévière
22 août 2016

 

1 L’Armée de libération du Kosovo ou UÇK (en albanais Ushtria Çlirimtare e Kosovës) est une organisation paramilitaire qui a combattu pour l’indépendance du Kosovo à la fin des années 1990. Après la guerre du Kosovo remportée grâce à l’intervention de l’OTAN, et suite à la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations unies le mouvement est dissout et intégré au Corps de protection du Kosovo. Certains de ses membres jouent toujours un rôle de premier plan dans la politique kosovare. Le mouvement a fait l’objet de nombreuses accusations de crimes contre l’humanité pour, entre autres, des faits de trafic d’organes et d’épuration ethnique à l’encontre des populations serbes et roms.
2 Les Ouighours représentent, en effet, l’ethnie la plus nombreuse du Xinjiang, soit 46% de la population (13 millions) malgré une « hanisation » galopante depuis l’arrivée au pouvoir de Mao. Il existe par ailleurs une diaspora ouïgoure très active regroupée dans le Congrès mondial des Ouïghours dont le siège est à Munich, l’Allemagne ayant accueilli de nombreux réfugiés politiques ouïghours. Cette organisation est présidée par Rebiya Kadeer, militante des droits de l’homme libérée des prisons chinoises, qui vit aux États-Unis où existe une association américaine des Ouïghours : le Uyghur Human Rights Project, forme classique des ONG soutenues par la CIA et le département d’État américain .

Et aussi

Publicité
Publicité
Commentaires
SPARTACUS
  • Information sur le mouvement des conseils ouvriers de la gauche germano-Hollandaise, ainsi que sur la lutte de classe dans le monde. voir en complément le site MONDIALISME. Pour correspondre:
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
SPARTACUS
Visiteurs
Hier 0
Depuis la création 321 360
Publicité