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16 octobre 2018

Dans le monde une classe en lutte septembre 2018

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Vers un nouvel internationalisme ?

Pendant presque deux siècles, l’internationalisme a été le but des Internationales ouvrières et/ou politiques propageant une idéologie et d’une méthode d’action mondiale pour établir une autre société hors des bases du capitalisme. Il serait trop long d’en retracer une histoire complexe qui, après une deuxième internationale sociale-démocrate, d’une troisième léniniste puis stalinienne, d’une quatrième trotskyste, sans compter différentes autres tendances se parant aussi de ce titre comme par exemple l’Internationale situationniste.

Après qu’elles ont toutes connu plus ou moins de présence au niveau mondial, y compris dans la gestion d’États, force est de constater qu’elles ne sont plus que l’ombre de ce qu’elles furent, participant au déclin général mondial des idéologies et des formes d’organisation dont elles étaient porteuses. En particulier, après la dernière guerre, deux internationales syndicales participèrent à la guerre froide, la FSM inféodée à l’URSS et la CISL inféodée aux USA, elles ne représentent plus rien après la disparition du régime soviétique.

On pourrait croire l’internationalisme mort, seulement promu par des groupes extrêmement minoritaires si, dans les dix dernières années (en fait depuis la crise de 2009) n’étaient apparus, au delà des cadres nationaux, des événements qui même s’ils diffèrent et ne se rattachent pas entre eux témoignent de la résurgence d’un internationalisme de fait, qui ne procède pas d’une idéologie et qu’aucune Internationale ne peut revendiquer. De même, la plupart de ces mouvements divers, alors qu’ils en ont le caractère, ne se revendiquent pas internationalistes. Leur point commun est leur naissance, dans un pays défini, autour de problèmes locaux, souvent due à des initiatives informelles, avec une utilisation intensive des réseaux sociaux qui assurent leur diffusion universelle et la rencontre avec des situations similaires dans un pays ou un autre.

Ainsi peut-on classer l’expansion de ce qu’on a nommé le « printemps arabe » ou celle du mouvement «occupy» qui, par delà leurs caractères spécifiques et la confusion qu’ils pouvaient révéler, touchaient l’ensemble du système social.

Parallèlement, d’autres mouvements bien plus spécifiques ont pris une dimension mondiale, l’utilisation des réseaux sociaux ne faisant que confirmer que le problème auquel ils s’attaquaient était universel. Le pionnier en la matière fut le mouvement contre le harcèlement sexuel issu des États-Unis et qui a gagné le monde entier. D’autres ont pris le relais de « journées » mondiales sur un sujet ou un autre plus ou moins ignoré autrefois : la journée de la femme a connu dans bien des pays des manifestations de masse, il en est de même pour la journée mondiale contre le réchauffement climatique.

En revanche, des mouvements nationaux très puissants contre l’austérité ou contre la corruption, s’il témoignent d’une concomitance et d’une constante de masse et de violence, s’ils peuvent être considérés comme répondant à une situation globale mondiale et engendrer une sorte d’internationalisme, ne dépassent pas les frontières nationales, même s’ils sont générateurs d’un mouvement mondial pas plus coordonné, celui des migrations.

Bien que certains commentateurs aient tenté de classer une bonne partie des mouvements ayant pris ainsi une expansion internationale comme émanant des nouvelles classes moyennes, on ne sait trop qui participe à ces mouvements de masse qui pour une part concernent les prolétaires face aux conditions que leur fait subir le capitalisme, tant dans le travail que dans leur quotidien.

Par contre des mouvements récents n’ont pas cette ambiguïté. Ils sont nouveaux mais on peut les relier aux mouvements cités ci-dessus par le fait qu’ils n’émanent pas des organismes de lutte traditionnels mais de courants de base marginaux dans la lutte de classe. Deux exemples récents peuvent constituer une sorte d'avant-garde de mouvements à l'échelle mondiale correspondant à l'activité mondiale des multinationales qui, en créant des conditions identiques à des masses de prolétaires, créent en même temps le terrain pour une lutte généralisée. C'est ce qui vient de se dérouler dans nombre de centres d'Amazon et dans la compagnie aérienne low cost Ryanair. La segmentation géographique ou statutaire a été dépassée dans l'organisation un peu sui generis de mouvements dépassant les frontières nationales. Serait-ce l'amorce d'un nouvel internationalisme — ouvrier cette fois — répondant à la mondialisation des activités économiques des multinationales ?

Tirons le bilan de la grève à la SNCF

(Un collectif d'ouvrier juillet-août 2018. Si ce texte t'a intéressé, si tu veux le commenter, le critiquer… 
contacte-nous à: collectifdouvriers@protonmail.com)

 Ce texte est la synthèse de discussions menées entre cheminots de la région de Nantes sur le mouvement de mars à juillet 2018. Issue d’échanges entre grévistes, elle se veut une contribution au bilan de cette lutte.

La longue période de grève perlée n’est pas encore terminée, mais le résultat est là. Déroute complète devant les plans gouvernementaux. Ce mouvement, qui se représentait comme le dernier verrou d’un secteur organisé, a subi une défaite sous le regard de tous les travailleurs. Même les responsables syndicaux se grattent la tête pour trouver des conquêtes à mettre à l’actif de la grève : des négociations avec le premier ministre plutôt qu’avec la ministre ; la reprise par l’État d’une partie de la dette de la SNCF, reprise déjà actée par le rapport Spinetta et rendue nécessaire par le changement de statut de l’entreprise en société anonyme (S.A.) Bref, on a gagné que dalle !

Alors un bilan, pour quoi faire ? Cette défaite d’une lutte ouvrière s’inscrit dans la suite impressionnante de revers qui nous sont infligés par l’offensive capitaliste. Fort de son succès, le gouvernement va multiplier ses initiatives sur tous les plans (retraite, chômage, etc.) en mettant à profit le sentiment que résister est sans effet. Si l’on veut rompre avec ce sentiment, contribuer à ce que les luttes ouvrières se hissent à la hauteur de cette offensive débridée et retrouver les véritables forces du mouvement ouvrier, il faut un bilan sans concession. Bilan en positif comme en négatif qui doit nous servir pour continuer de militer en apprenant du passé.

On pourra nous dire : vous noircissez le tableau à parler de défaite, il n’y a qu’à voir les chiffres de participation à la grève pour se convaincre du contraire. Oui bien sûr, la base des grévistes a été souvent nombreuse. Mais cette réalité pose encore plus de problèmes. Comment, dans ces conditions de forte participation, arrive-t-on à une sortie de lutte sans qu’aucune concession, même la plus minime, n’ait été arrachée au gouvernement ? Nous sommes d’avis que la critique et l’auto-critique sont vitales pour tirer les leçons de ce mouvement.

Les points de vue développés ici reflètent une expérience locale et limitée. Nous sommes donc très intéressés à les approfondir à la lumière d’autres expériences de lutte (contact : collectifdouvriers@protonmail.com). Il est bien possible qu’ailleurs la lutte ait pris des formes différentes. Enfin et surtout, nous voulons ouvrir la discussion dans l’intérêt de l’ensemble de notre classe sociale, sans nous limiter au cadre étroit d’une entreprise. Il n’y a pas de raccourci sur le chemin de l’organisation des ouvriers par les ouvriers eux-mêmes.

 ,snLe rapport Spinetta est publié le 15 février. Dans ses grandes lignes est déjà annoncé le contenu du plan gouvernemental : reprise de la dette, transformation de l’entreprise en S.A., mise en concurrence, suppression du statut, etc. Le gouvernement avance ouvertement.

De l’autre côté, c’est l’attentisme. Il faut attendre le 22 pour une première réaction organisée par les syndicats. Cette journée d’action à Paris est annoncée comme une démonstration de force et c’est le cas… en trompe l’œil. Plusieurs milliers de manifestants dans la rue, qui défilent en deux cortèges parallèles : cheminots d’un côté, salariés de la fonction publique de l’autre. Pour faire du bruit, on a fait du bruit ! Mais entre les fumigènes, les sonos, les pétards éclatés à la masse, difficile de s’entendre et de discuter. Déjà l’option choisie par les syndicats (CGT en tête) apparaît : montrer la force de la corporation organisée du haut vers le bas. 
Pourtant des manifestations de la fonction publique ont lieu le même jour dans les différentes villes, à Nantes et ailleurs. On voit déjà que cette option tourne le dos à la recherche d’unité là où les travailleurs, localement, pourraient en maîtriser le développement.

Entre-temps est connu le calendrier de grèves : 2 jours suivis de 3 jours de reprise du travail. Notre première impression est négative : est-ce vraiment en étalant en longueur le mouvement qu’on va gagner ? Avec ce calendrier on donne des billes à la SNCF pour la laisser s’organiser (pas de réservation TGV ouverte les jours de grève, par exemple). On peut se rassurer en se disant que des moyens d’action différents peuvent se compléter et monter en puissance. Il resterait possible de déborder le calendrier intersyndical après les premières périodes de grève. 
Des discussions sur les modalités de grève ont lieu, mais la grande majorité s’affirme pour. D’autres y sont favorables avec quelques nuances. Quelques-uns espèrent un mouvement puissant qui déborde le cadre fixé. L’argument principal de cette majorité, ce sont les difficultés à mobiliser. Mais dans l’ensemble il reste difficile de tirer les vers du nez des uns et des autres pour faire un bilan du 22 et des suites. Or il y aurait un grand besoin de débattre de l’action. 
Participation forte à la grève visible dans les taux de grévistes, aux premières AG aussi (240 le 3) mais rapidement la démobilisation et la routine s’installent.

L’alternance jours de grève/jours travaillés devient une routine, certains choisissent leurs jours en fonction de leurs besoins personnels, du week-end… La participation oscille entre 60 et 150 grévistes aux AG, avec un rebond parfois à 200. Le train-train s’installe et se reproduit jusqu’au bout de cette période. 
Il y a bien des discussions, des interrogations. Mais pourquoi le calendrier de l’intersyndicale CGT-UNSA-CFDT n’a jamais été débordé ?

Il est évident que la masse des grévistes n’a jamais été en position d’aller plus loin que ce cadre, qui s’est imposé sur tout autre initiative. Soyons directs : il manque la détermination chez bon nombre de se déplacer pour construire le mouvement, comment l’expliquer ?

Les pertes de salaires ne peuvent sérieusement expliquer les freins à la combativité. Les menaces disciplinaires sont réelles, mais pas générales. On constate quelque fois un individualisme affirmé, on croise plus souvent le sentiment d’impuissance. « À quoi bon lutter puisque Macron veut aller jusqu’au bout ? » Ce manque de détermination, de liens actifs avec la grève, peuvent s’expliquer : éloignement du domicile du lieu de travail, des collectifs de travail, poids des restructurations successives, etc.

Mais les doutes sur les méthodes syndicales sont plus que justifiés. L’intérêt de l’AG comme assemblée de débat avait déjà été vidé de sa substance par les syndicats qui organisent le mouvement. On est assommés par la lecture de longs communiqués syndicaux tout faits. En revanche le débat sur place est inexistant. Seules quelques interventions plus « pêchues » rompent cette monotonie, mais ne remplacent pas le véritable débat. L’issue de l’assemblée est connue d’avance.

On a entendu cet argument ahurissant : les cheminots seront plus forts s’ils restent sur leurs revendications propres à la défense de la SNCF et du statut. Rien de plus faux ! L’intersyndicale a travaillé constamment dans une optique corporatiste en mettant en avant l’unité des cheminots (donc entre exécution, maîtrise et cadres), par l’épuisement du mouvement dans la fameuse « action », etc. Et elle parle au bout du compte d’une grève« exemplaire » !

En avril, plusieurs mouvements ou grèves locales (Nantes métropole, EDF, étudiant-e-s) permettaient d’envisager une possible extension du mouvement. Cependant les luttes ou début de luttes resteront isolés entre elles, telle la journée d’action (22) de la fonction publique décalée par rapport au préavis SNCF. Les syndicats de ENEDIS de leur côté lanceront une grève large à la toute fin du mouvement cheminot…

La manifestation du 14 a vu la succession de deux manifestations : la 1re appelée par l'intersyndicale, la 2nde par les soutiens de la ZAD de NDDL. Sans être ridicule, la participation à la première est limitée et les cadres syndicaux sont exaspérés parce que le cortège cheminot est dépassé par d'autres éléments. Même si la manifestation reste assez solidaire pour le « deuxième tour », seule une poignée de cheminots reste sur place. De toutes façons, la manifestation est arrêtée par les flics et stérilisée par les affrontements.

À la fin de la manif du 19, nous avons été accueillis par les forces de l’ordre au bout du pont Anne de Bretagne par un petit jet de gaz lacrimo. Nous avons mis un peu de temps pour arriver à se rassembler devant les anciens chantiers Dubigeon. Plein de monde était déjà parti à cause de l’attente, des gaz et de la mise en place tardive du camion du syndicat pour que les gens prennent la parole. Les mêmes discours aussi longs, nous sommes restés à une centaine de personnes. Par la suite les flics ne sont plus intervenus et sont partis. Pour une manif interpro, c’était bien maigre !

Il faut bien remarquer le peu d’intérêt de la base porté aux autres luttes. Nous voyons peu de curiosité pour aller échanger avec d’autres sur des perspectives communes. Il est remarquable que malgré les nombreuses journées de grève, presque tous les rendez-vous aient lieu dans un rayon de 500 mètres autour de la gare. Des échanges auront lieu (intervention d’un représentant CGT de l’EDF, de groupes étudiant-e-s à plusieurs reprises, rencontre aux finances publiques) sans déboucher sur une quelconque mobilisation.

Chacun reste devant son lieu de travail plutôt que d’aller rechercher l’extension du mouvement. Ces initiatives attirent peu et manquent vraiment de combativité. On voit bien que des mots d’ordre séparés, chacun de son côté, ne sont pas un terrain favorable à la lutte collective.

La création d’une caisse de solidarité et la publicité qui lui est faite dans les médias accréditent l’idée que les cheminots serviraient de bouclier pour les autres travailleurs. Ceux-ci devraient soutenir les cheminots, non par leur propre action et leur lutte, mais par le don d’argent. La Tribune des cheminots (juillet-août 2018) valorise cette attitude de spectateur, pas d’acteur, en reproduisant des messages reçus de donateurs : « de vous battre pour vous et pour nous », « lâchez rien, tenez bon », etc. Les acteurs de cette caisse sont connus : des intellectuels de gauche qui trouvent là leur raison d’exister, et les organisations syndicales. Si l’importance des dons témoigne d’une sincère solidarité à la base, la stratégie syndicale de grève longue et d’unité par délégation est une impasse pour l’avenir.

Il existe certes une petite minorité active composée de militants syndicaux ou politiques qui cherche à provoquer des convergences. Mais il ne lui appartient pas de créer des conditions que seul le mouvement des travailleurs peut développer, conditions qui manquent encore.

Au printemps 2018, la dynamique du mouvement étudiant était localement assez importante et aurait pu être un terrain de convergences (on fait exception de la lutte à NDDL qui renvoie à une autre composition sociale, d’autres buts et donc d’autres développements). Or le mouvement des cheminots n’est jamais allé vers la solidarité agissante, et c’est par là que les grévistes ont perdu.

Le verrou syndical

Les syndicats sont restés de bout en bout aux commandes de la lutte. Beaucoup de collègues sont critiques, sceptiques, ne se sentent pas représentés par les syndicats, mais ne sortent pas des habitudes de délégation. Nombreux sont les militants de la grève à être encartés ou à s’afficher avec un badge syndical (90 % à vue d’œil). Le rôle dirigeant de la CGT ne lui a jamais été disputé.

Le syndicat a un fonctionnement basé sur l’homogénéité de façade, une structure pyramidale à l’image de l’État. Les AG inter-services sont balisées au préalable par l’intersyndicale et les AG de syndiqués (elles-mêmes dirigées en amont).

SUD n’a pas joué un rôle plus positif : des interventions certes moins corporatistes, plus combatives, mais sa position sur le passage à la grève reconductible est restée très timorée. SUD est resté solidaire de l’intersyndicale et n’a pas cherché à transformer le mouvement dans le sens d’une organisation de la grève par les grévistes eux-mêmes. Ainsi l’enjeu n’est pas d’opposer un syndicat à un autre, mais de débattre d’une orientation sur le fond. Le matériel syndical est abondant pour diffuser les consignes d’action et les explications techniques. Les syndicats ne manquent pas de propositions et d’inventivité, comme si Macron avait seulement fait de mauvais choix et que d’autres seraient à portée de main.

Il n’y a donc aucune explication véritable de la crise qui mène au démantèlement de l’ex-monopole SNCF. Il n’y a pas non plus de contenu positif pour les ouvriers (conditions de travail, nuit et travail décalés, mobilité imposée, salaires, etc.). La CGT défend au contraire le statut avec des droits comme contre-partie des devoirs du cheminot envers son entreprise.

 Nous avons dégagé de ces expériences quelques leçons

1°- Après la fin du calendrier initial (28), la CGT lance de nouvelles journées, elle nous appelle à « la lutte » . Plutôt que d'appeler à de nouvelles actions qui ne peuvent que reproduire l'échec de celles auxquelles nous avons déjà participé, l'urgence est de se regrouper pour discuter et exercer notre esprit critique.

La classe ouvrière n’est pas épargnée par l’inculcation, dès le plus jeune âge, d’idées puantes : concurrence, chacun pour soi, nécessité d’écraser les autres pour s’en sortir. Face à toute cette pollution dans les têtes, la conscience de classe est notre 1re force. Cette conscience ne peut s'affirmer qu'en prenant le temps de débattre, de remettre en question les consignes, surtout quand elles viennent des syndicats qui prétendent être nos défenseurs. D'autres mouvements vont venir : il faudra se regrouper dès le début pour favoriser cet état d'esprit et éviter de se mettre à la traîne des événements.

2°- La situation actuelle est marquée par un mécontentement ouvrier général. Mais notre lutte n'a pas été prise en main par les grévistes eux-mêmes, elle n'a pas cherché à déborder le cadre traditionnel du syndicat et des mots d'ordre propres à la SNCF. Or la conscience véritable de la situation passe par des revendications communes aux ouvriers contre toutes les divisions d'entreprises, de régions, de secteurs, etc., puisque nous avons tous en commun d'être salariés (ou privés d'emploi) par le capital.

3°- Au-delà de la résistance indispensable au gouvernement et au patronat, il faut donner à notre lutte un contenu beaucoup plus large et radical. Les ouvriers forment la classe qui par son travail est à l'origine du profit. C'est par notre travail que les Vinci, SNCF, Arcelor-Mittal, E. Leclerc, LU et autres capitalistes se battent dans la course au profit. Nous n'avons aucun devoir ou respect à observer pour les entreprises responsables de l'exploitation et de la hiérarchie. Le progrès technique ne doit plus servir à augmenter le chômage et la précarité. Il devrait servir au contraire à réduire drastiquement le temps de travail. Il devient clair que le système capitaliste s'enfonce dans la crise. Défendre nos conditions de vie doit donc déboucher sur une lutte contre ce système dans sa globalité. Nous ne voulons pas servir la machine à fric, mais nous en débarrasser.

 

ARGENTINE, la crainte des dirigeants d’un retour à 2011

 L’Argentine, c‘est une population de 45 millions d‘habitants (et une superficie de 5 fois la France), mais répartie très inégalement puisque 91 % de cette population vit dans des villes dont un tiers se concentre dans la région de Buenos Aires et les provinces voisines de Cordoba, Santa Fé et East River, toutes contiguës du fleuve Rio Paraná dont le débit est si important que les navires de haute mer peuvent remonter jusqu’au port de Rosario à 550 km de la mer, ce qui fait de ce fleuve et de son estuaire le poumon économique du pays.

L’Argentine est un pays à la fois agricole et industriel qui dispose d’importantes ressources minières ; une bonne partie de son commerce extérieur repose sur les exportations agricoles (soja ,blé, viande). Son développement économique la fait classer en 2017 pour son PIB au 21e  rang des États du monde dénommés dans le classement capitaliste « émergents », en compagnie de la Turquie, de l’Indonésie de l’Afrique du Sud, du Brésil et du Mexique, c’est-à-dire des pays de seconde zone eu égard aux entités économiques plus puissantes, USA, UE, Chine, Japon. Cette distinction devient essentielle pour notre propos car le développement de ces « émergents » dépend étroitement des investissements étrangers qui y trouvent des sources de matières premières, de la main d’œuvre peu coûteuse, et des marchés pour leurs produits.

Il est difficile de décrire en quelques lignes la situation économique et financière présente du monde, d’autant plus que les économistes eux-mêmes divergent dans leurs analyses. On assiste dans tous ces « émergents » à un retrait des investissements étrangers dont le résultat est non seulement la chute de la monnaie nationale et le renchérissement du dollar, la monnaie de compte mondiale avec toutes les conséquences sur les importations et exportations, mais surtout des fermetures d’entreprises et les licenciements conséquents et une diminution importante des recettes de l’Etat. Cette situation conduit les gouvernements à faire appel à un prêt du FMI, lequel, comme d’habitude, consent à un tel sauvetage financier contre des mesures drastiques dans tous les services de l’Etat. C’est la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui l’Argentine avec un gel des salaires et des retraites et des restrictions importantes dans tous les secteurs dépendant de l’Etat.

Le souvenir de la crise sociale de 2011 survenue dans des circonstances apparemment identiques et qui avait vu, au-delà des manifestations traditionnelles (les concerts de casseroles), des pillages à grande échelle de supermarchés, des barrage routiers et le développement d’organisations de lutte dans les banlieues – les piqueteros, est présent dans tous les esprits, notamment des gouvernants. D’autant plus qu’en plus de la hausse du chômage, les prix ont bondi de 30 %. Près d’un tiers des Argentins sont tombés dans la pauvreté et les cantines populaires sont débordées avec l’afflux de familles entières qui ne peuvent plus se nourrir.

Les craintes des dirigeants ont pu sembler se concrétiser avec le retour des manifestations convoquées par le canal des réseaux sociaux avec les concerts de casseroles, des pillages et tentatives de pillages de supermarchés dans tout le pays (l’une d’elles a fait un mort dans les affrontements avec les flics). Parallèlement, après un mois de grève, des dizaines de milliers d’enseignants sont descendus dans la rue contre les réductions budgétaires et les syndicats annoncent une grève générale de 24 heures pour le 25 septembre.

Pour le moment, il est difficile de dire comment évoluera cette situation. Mais elle est sensiblement différente de celle de 2011 à cause de la présence, pas entièrement nouvelle, d’un troisième larron, la Chine, qui outre des échanges monétaires atténuant l’effet de la hausse du dollar, va acheter du soja et de la viande en échange d’investissements essentiellement dans le secteur minier, prenant ainsi le relais des sorties antérieures de capitaux.

RUSSIE

Le gouvernement de Poutine a cru bon de profiter du mondial de foot en Russie pour faire passer quelques jours avant son ouverture une réforme qui, en particulier, fait passer l’âge de la retraite de 60 ans à 65 ans pour les hommes et de 58 ans à 63 ans pour les femmes. Ce qui fait qu’avec l’âge moyen de vie de 66,5 années, bien peu de Russes pourront bénéficier d’une retraite car ils seront tous morts avant. Ce qui fait aussi que l’augmentation promise du montant de la retraite n’entraînera pas de dépense supplémentaire car bien peu en bénéficieront, et pour peu de temps. D’autre part, alors que comme ailleurs le montant de la retraite est déterminé en fonction des cotisations versées par le salarié, cette retraite est vraiment minimale car les salaires baissent après 45 ans d’âge jusqu’à 20 %, et qu’une économie informelle développée ne garantit rien du tout.

Mais c’était méconnaître la résilience de la population russe dont 80 % affirment leur opposition à cette réforme. Les festivités passées, des mouvements ont éclaté début juillet dans une trentaine de villes sous forme de manifestations souvent réprimées, et sont relayées régulièrement depuis par les oppositions politiques tout autant réprimées. Une mesure a été donnée par ce rejet du pouvoir politique lors des élections régionales récentes qui ont vu une participation plus basse que jamais de 20 % de citoyens. Une des raisons de cette réforme des retraites serait le manque de main d’œuvre causée par une dénatalité persistante et le vieillissement de la population.

 VIETNAM

Des actions de protestation illégales se sont déroulées au Vietnam début janvier 2018 en réponse à des plans concernant les SEZ (Special Economic Zone) selon lesquelles les compagnies étrangères pourraient louer des terrains pour 99 ans, y construire des usines, et y appliquer des conditions d’exploitation dérogatoires au droit commun. Des protestations nationalistes anti-chinoises se sont répandues dans tout le pays comme il y a quatre ans, en mai 2014, en réponse à l’autorisation donnée à la Chine d’exploiter des puits de pétrole off shore dans un secteur très disputé des mers de Chine. Ces protestations avaient vu des centaines d’usines attaquées et incendiées. On avait compté 7 morts et des milliers d’arrestations. Après coup, on s’est aperçu que la majorité des usines attaquées n’appartenaient pas à n’importe qui, pas à des Chinois de Chine mais à des Coréens, Taïwanais, Japonais ou Singapouriens.

En 2014, d‘autres revendications étaient apparues. Alors que le sens était en majorité nationaliste, certaines revendications touchaient la liberté d’expression et des changements dans les conditions de travail. Bien des ouvriers se mirent alors en grève sauvage et rejoignirent les manifestations, particulièrement là où se trouvaient les plus fortes concentrations industrielles, dans les provinces de Dong Nai et Binh Dong, où les usines furent attaquées, incendiées, vandalisées ou occupées.

En 2018, les protestations se retournèrent le plus souvent contre l’État vietnamien. Le sentiment général était antichinois mais dans la foule, on pouvait voir des pancartes portant des revendications pour la liberté religieuse, la liberté d’expression, ce qui pouvait être une réponse au projet de loi sur la cybersécurité qui autoriserait les autorités à exercer un droit de censure sur les médias sociaux et obligeant certains comme Facebook à révéler leurs communications. Aussi, on pouvait entendre des manifestants qui rejoignaient ces manifestations nationalistes avec des revendications diverses et des affirmations selon lesquelles le gouvernement vietnamien (au moins historiquement) avait été perçu comme plus permissif eu égard à ce type de protestation, dont la légitimité était basée sur l’histoire du mouvement de libération nationale.

Aujourd’hui, ce type de protestations continue de se développer. Pour l’essentiel, elles ont consisté en une combinaison de manifestations politiques et de conflits directs avec l’Etat. Les informations ne sont pas faciles à obtenir et ne viennent pas toujours au moment où l’événement se déroule. Une pesante censure y est pour beaucoup. La plupart des vidéos ou images qui ont été diffusées sur Facebook par les acteurs de base ont été rapidement effacées par Facebook.

Pourtant quelques unes y ont échappé comme :

- des grèves sauvages dans des usines proches de Ho Chi Minh City, comme des grèves dans les provinces de Dong Naim et Binh Dong

- des manifestations de masse à Ho chi Minh City, Hanoi, Nha Ting

- des blocages routiers, y compris le blocage dix heures durant de la route nationale, lien principal entre Hanoi et Ho Chi Minh City

- des attaques contre des structures policières diverses dont des commissariats, y compris un guet-apens contre les équipes spéciales chargées de la répression des émeutes qui ont dû se rendre et dont les membres furent libérés totalement déshabillés

- une tentative d’occuper des bâtiments publics à Binh Thuan qui fut repoussée à l’aide de canons à eau, comme à Phan Thiet quand la foule envahit le siège du PC local

 

On ne peut savoir clairement où tous ces mouvements distincts et localisés peuvent mener car les revendications ne sont pas toujours bien clairement évoquées.

Quelques-uns des observateurs pensent qu’une protestation peut rapidement se terminer pour réapparaître ailleurs plus tard. Pourtant, les résultats immédiats tangibles sont :

- des centaines d’arrestations lors des protestations et d’autres opposants déportés on ne sait où

- des manifestants chassés des rues qu’ils ont occupées pendant trois nuits sauf à Bin Thuan où les protestations se tinrent nuits et jours, et où le pouvoir paraissait alors entre les mains de la foule des manifestants.

 Des concessions du gouvernement : il déplaça la durée du bail de la SEZ et les clauses du bail non dérogatoires aux lois existantes, notamment sur les conditions de travail. Et quelque temps après ces concessions, le gouvernement annonça qu’il reportait la mise en œuvre de l’ensemble du projet au moins jusqu’à octobre.

 IRAK : les séquelles de la guerre contre daesh

Le Chatt Al Arab est l’estuaire commun de plus d’un kilomètre de large de l’Euphrate et du Tigre, à proximité de l’Iran et du Koweït, avec pour centre les villes de Bassorah irakienne et d’Abadan iranienne. Dans les années 1950 c' était encore une région prospère, pas seulement à cause du pétrole mais aussi d’une incroyable richesse écologique adaptée à l’eau salée de la mer et à l’eau douce des fleuves, bordée d’une ceinture de plus de 15 millions de palmiers et d’une grande richesse agricole.

Trois guerres (Iran-Irak 1980-1988, guère du Golfe 1990-1991, guerre d’Irak 2003), la répression sanglante de Saddam Hussein en 1991, l’instabilité présente autour du conflit syrien et la percée de Daech ont anéanti cette prospérité et causé d’irréparables dommages, non seulement à cette richesse écologique mais aussi à l’ensemble des activités agricoles. Cet anéantissement a été renforcé par les ponctions importantes en amont sur les eaux des deux fleuves par la Turquie, l’Iran, le Kurdistan et la région de Bagdad. C’est ainsi qu’un habitant voit la ville de Bassorah : « Aujourd’hui, les canaux de la ville sont livrés aux immondices. Les turbines des centrales électriques sont à l’arrêt et la ville du pétrole survit presque sans électricité et sans eau potable. La moitié des habitants sont chômeurs. »

Le réchauffement climatique est venu renforcer la diminution drastique des eaux douces du fleuve : l’élévation du niveau de la mer a fait que la nappe phréatique est devenue salée et que toute la campagne environnante — autrefois des marais, aliments en eau douce et riches de cultures de riz et de maïs — est devenue impropre à toute culture (récemment, le gouvernement a même interdit ces cultures consommatrices de ce qui pouvait rester d’eau douce).

Cet été a été particulièrement éprouvant pour les populations avec une moyenne de 50 °C et une pénurie d’électricité (toute fourniture de courant venue d’Iran ayant été coupée pour non-paiement). Les guerres et les conséquences de l’appauvrissement en eau et de la désertification ont entraîné un exode de la population aux alentours de la ville de Bassorah dans l’espoir de profiter de la manne pétrolière (la région assure les 3/4 de la production pétrolière d’Irak, c’est le terminal de l’ensemble des pipelines du pays et elle possède de nombreuses raffineries).

La province compte 5 millions d’habitants sur les 38 millions de l’Irak dont 4 millions vivent autour de Bassorah, où la population s’est accrue d’un million de migrants depuis 2003. Ces migrants vivent dans des bidonvilles avec des problèmes d’approvisionnement notamment en eau et en électricité (le 7 septembre dernier, 30 personnes ont dû être hospitalisées suite à une intoxication microbienne avec l’eau). Le chômage est supérieur à 30 %.

Toute la population de cette région est de religion chiite, comme le gouvernement de Bagdad, fait qui a son importance car lors des émeutes dont nous allons parler personne ne peut avancer des motivations religieuses. En fait, devant la carence des autorités chiites de Bagdad, ce sont les responsables religieux locaux qui assument les fonctions régaliennes, situation qui expliquera qu’ils seront particulièrement visés. C’est aussi cette appartenance à la religion chiite liée à la misère sociale notamment chez les jeunes (60 % de la population a moins de 24 ans) qui explique que plus de 60 000 d’entre eux se soient portés volontaires dans l’armée levée pour combattre Daesh.1 580 sont morts et 3 000 ont au moins été amputés d’un membre et selon les statistiques des Hachd al-Chaabi.. Tous avaient espéré, en s’engageant ainsi, qu’ils en tireraient un avantage quelconque ; une fois revenus au pays, ils sont totalement abandonnés, subissant la situation commune et d’autant plus frustrés.

Situation globale d’autant plus explosive que l’activité pétrolière se développe mais les espoirs des habitants d’y trouver un emploi est pratiquement nul car les multinationales qui exploitent le pétrole préfèrent embaucher des migrants venant de tout le sud-est asiatique, particulièrement dociles et sous-payés.

C’est ce qui explique les événements qui vont se déclencher, à partir d’un simple blocage de l’entrée d’une raffinerie le 8 juillet dernier, par des jeunes déterminés à obtenir une embauche. La répression brutale de ce piquet a été l’étincelle qui a enflammé toute la région dans un vaste mouvement de protestation contre le pouvoir local chiite, lorsque chaque vendredi des milliers manifestaient contre la dégradation de leur condition de vie, la corruption, le chômage et la répression. Notamment en bloquant le port d’Umm Qasr par lequel passent les exportations pétrolières et les importations de nourriture, bloquant aussi les artères routières principales, occupant l’aéroport local. Pour le vendredi 7 septembre, le gouvernement local avait déclaré un couvre-feu, toute personne vue dans la rue serait immédiatement arrêtée. L’explosion populaire de ce vendredi 7 septembre est devenue une véritable émeute avec l’incendie de bâtiments publics, des sièges du parti chiite, du consulat iranien, des casernes des milices chiites, de mosquées, du siège de la TV locale. Cette explosion sociale, en dehors de toute question religieuse ou ethnique, déclenche une répression d’autant plus violente ; on compte plus d’une douzaine de morts, des dizaines de blessés et des centaines d’arrestations. Mais le gouvernement de Bagdad pour qui l’enjeu pétrolier reste essentiel et qui craint l’extension du mouvement dans la région de Bagdad monte d’un degré dans la répression avec l’établissement d’un commandement conjoint des opérations disposant de pouvoirs étendus, une recommandation de prendre des mesures sécuritaires exceptionnelles et des condamnations judiciaires sévères.

 

CANADA La grève des grutiers

Dans ce qu’est aujourd’hui le BTP, sur les chantiers de constructions de toutes sortes, la grue est un des éléments essentiels du procès de construction, ce qui donne aux grutiers un pouvoir de fait. De plus, ce sont des spécialistes qui assument de grandes responsabilités et qui doivent avoir une sérieuse formation professionnelle. Jusqu’alors, on ne parlait guère de grèves de grutiers mais récemment, un mouvement de grèves sauvages de grutiers en Chine avait focalisé la lutte de classe sur cette activité.

Le 14 juin dernier, les grutiers du chantier de construction du pont Champlain à Montréal se mettent en grève sauvage, totalement illégale suivant la réglementation canadienne du travail. Leur protestation se dirige contre un changement important dans la formation des grutiers imposée par l’organisation patronale du secteur, la Commission de construction du Québec (CCQ).

D’une part, la période de formation qui était jusqu’alors de 870 heures est réduite à 150 heures et même à 80 heures pour ces grues mobiles que sont les camions-flèche, d’autre part ce changement autorise le remplacement temporaire d’un grutier par un ouvrier quelconque du bâtiment. Le syndicat Union des opérateurs de grues n’a pratiquement pas réagi à cette réforme. Ces grutiers en grève mettent en avant les risques évidents touchant la sécurité sur les chantiers mais il s’agit aussi de la défense professionnelle contre un accès plus facile à cette profession qui serait un moyen de pression des patrons sur las salaires et sur les conditions de travail.

La grève fait tache d’huile spontanément sur tous les chantiers de construction du Québec, et le lundi 18 juin la grève est totale, bloquant pratiquement tous les chantiers du BTP.

Le CCQ ne tarde pas à réagir, d’une part en criminalisant les démarches des grutiers en grève souhaitant le débrayage le plus total possible, assimilant ces démarches à des chantages, pressions physiques (ce qui n’est jamais exclu dans toute grève, 650 dossiers de poursuites ont été ainsi établis), d’autre part en déposant un recours devant le tribunal administratif pour faire déclarer la grève illégale et ordonnant la reprise du travail sous peine de pénalités importantes. Un tel jugement est rendu le 21 juin. Le syndicat, s’il apparaît qu’il soutient la grève d’une manière ou d’une autre, encourt une amende qui peut se monter jusqu’à 80 dollars par jour, et doit entériner ce jugement en ordonnant la reprise du travail, qui est effective le 25 juin, pas tant à cause de l’ordre du syndicat mais des menaces d’amende voire de licenciement contre les grévistes.

Le syndicat ne peut faire autre chose que de demander la formation d’une commission pour étudier les conditions d’application de la réforme patronale sur la formation des grutiers.

 CHINE

Fin juillet 2018, les 1 000 travailleurs de la firme Shenzhen Jaic Technology, dont la production va essentiellement aux USA, se mettent en grève et tentent de constituer un syndicat indépendant ; 7 sont licenciés et 30 sont arrêtés.

Pour la première fois en Chine, un mouvement de solidarité s’est développé dans tout le pays, impulsé par des étudiants de l’université proche et qui a touché 11 autres universités sous la forme d’une pétition qui a recueilli près de 2 000 signatures. C’est sans doute peu à l’échelle de la Chine mais cela vaut la peine d’être signalé et regardé comme une tentative de tourner la censure qui sévit sur les médias sociaux. Un exemple de la répression qu’encourent ceux qui s’engagent ainsi est donné par l’arrestation en novembre dernier des étudiants d’un groupe de lecture des œuvres de Marx sous l’inculpation : « des foules pour perturber l’ordre social ». Il n’est pas exclu que ces actions de solidarité soient une instrumentalisation des conflits par des oppositions politiques d’origine maoïste.

De toute façon, soutenues ou pas les grèves continuent : depuis le début de l’année, 1 050 grèves se sont ainsi déroulées (et ont subi des arrestations pour 23 d’entre elles), 2 000 dans les douze derniers mois.

 

Les exploités du low cost se rebiffent

On peut se poser plusieurs questions à propos du mouvement qui touche, à l’échelle européenne, les travailleurs de Ryanair, la compagnie aérienne low cost.

Pourquoi ces travailleurs ont accepté pendant si longtemps des conditions de travail telles qu’elles sont révélées aujourd’hui ?

Pourquoi se soulèvent-ils maintenant contre ces conditions, unis à l’échelle européenne ?

Les réponses sont à chercher dans le marché mondial des pilotes de lignes et hôtesses. La force de travail est une marchandise qui subit les règles du marché : s’il y a peu de demande de la part des employeurs face à une offre abondante de travailleurs, les salaires et les conditions de travail sont à la discrétion de l’employeur et les travailleurs sont d’une certaine façon contraints de les accepter.

S’il y a une demande importante, face à une offre réduite, salaires et conditions sont grandement améliorés.

C’est précisément cette dernière situation qui prévaut aujourd’hui : le parc européen de pilotes vieillissant, l’offre des emplois augmente. En 2016, cette demande s’est élevée à 20 000 pilotes et dans les années qui viennent, l’aviation civile devrait embaucher dans le monde 70 nouveaux pilotes chaque jour. Cette situation met les pilotes travaillant pour Ryanair dans une position de force, qu’ils n’avaient pas il y a quelques années. Le statut qui leur avait été imposé d’auto-entrepreneur, sous législation irlandaise, permettait de leur imposer des conditions de travail particulièrement contraignantes que l’état du marché des pilotes les contraignait d’accepter s’ils voulaient simplement travailler. La rareté des pilotes a fait qu’ils peuvent aujourd’hui se regrouper sur le plan européen dans des organisations distinctes pour tenter de faire modifier salaires et conditions de travail. Le conflit, à l’échelle européenne, est toujours en cours, a gagné les hôtesses et dure depuis des mois avec des formes diverses, la direction de Ryanair résistant de son côté pied à pied. Et pratiquant tous les coups tordus utilisés par des employeurs pour briser un conflit.

 IRAN Des manifestants attaquent une école religieuse

Des manifestants iraniens ont attaqué une école religieuse à Karaj, une province située près de Téhéran, a rapporté samedi l'agence de presse Fars, proche des conservateurs. « Environ 500 manifestants ont attaqué l'école vers 21 heures (vendredi), tentant de briser ses portes et de brûler des objets », a déclaré le directeur de l'école située dans la ville de Ishtehad.

Les protestataires « sont arrivés avec des pierres et ont brisé toutes les fenêtres de la salle de prière, scandant des slogans contre le régime », a-t-il affirmé. Ils ont ensuite été dispersés par la police anti-émeutes et certains arrêtés, 2 août 2018 – dans les villes de Shiraz, Esfahan, Karaj, Mashhad, Arak, Najaf Abadans !

 Slogans :

1) « Les fusils, les chars, les explosifs ne fonctionnent plus et les mollahs doivent se pendre ! »

2) « Réformistes et conservateurs ont pris fin ! »

3) « Notre problème : pas d'emplois, forte inflation ! »

4) « Les ouvriers préfèrent mourir plutôt que vivre une vie de pauvreté »

5) « A bas le dictateur ! »

6) « Malheur au jour où le peuple tiendra les armes ! »

 « … les manifestants chantent des slogans contre la dictature, le régime clérical et le guide suprême iranien Ayatollah Ali Khamenei… ont également appelé à la libération des prisonniers politiques. Dans Shahinshahr, près d'Ispahan, les femmes manifestaient contre les difficultés économiques et le hijab obligatoire, et appelaient les Iraniens d'autres villes à les soutenir. A Karaj, une ville densément peuplée près de Téhéran, des manifestants se sont rassemblés autour de la célèbre prison de Rajaishahr où des prisonniers politiques sont détenus à côté de criminels, scandant des slogans sur la volonté du peuple d'ouvrir les portes de la prison et de libérer les prisonniers politiques. Selon des rapports ultérieurs, la police avait dispersé des manifestants et gardait la prison ».

 Espagne, la manipulation des CDD

Jour de terreur pour l’emploi : 363 017 licenciements le 31 août 2018

Le caractère saisonnier de l’économie espagnole, très liée au tourisme, et la fraude, surtout dans le cas des enseignants, provoquent un séisme le dernier jour du mois d’août.

Le caractère hautement saisonner de l’économie espagnole, mais aussi les nombreuses lacunes de la législation du travail, expliquent que le 31 août 2018 ait été terrifiant pour l’emploi. Ce jour-là, en à peine vingt-quatre heures, la Sécurité sociale a désinscrit 363 017 travailleurs. C’est-à-dire que le système public de protection sociale a comptabilisé 15 126 licenciements par heure en comptant des journées entières. Un rythme vraiment frénétique. Le 31 août, plus de 300 000 postes de travail ont été détruits. Ce chiffre est à mettre en rapport avec la fin de nombreux contrats temporaires liés à la période estivale, principalement dans les zones touristiques, mais aussi avec les lacunes de la législation du travail qui permet d’embaucher et de renvoyer très facilement pour que les services publics de l’emploi assument le coût en prestations dans les périodes d’intérim. Quelque chose qui affecte aussi nombre de travailleurs autonomes qui, avec leur contrat mercantile, sont obligés d’accepter une clause selon laquelle au mois d’août ils ne percevront aucun salaire de la part de l’entreprise pour laquelle ils travaillent toute l’année.

Cela explique, par exemple, que le 2 juillet de cette année la Sécurité sociale désinscrive rien moins que 504 630 travailleurs. Beaucoup de ces travailleurs seront embauchés de nouveau après l’été, mais entretemps, c’est l’État qui couvre les frais. En tout cas cette donnée était cette année biaisée à la hausse parce que les deux jours antérieurs au 2 juillet ont été des jours non ouvrables, ce qui fait que des licenciements de juin ont été inclus, mais cela n’a pas été le cas en août car le 31 août était un vendredi, donc tout le mois était compté.

Et les résultats sont vraiment singuliers. Si on additionne les inscriptions qui ont été faites ce jour là, 58 375 nouveaux cotisants au total, il se trouve que le 31 août il s’est produit pas moins de 421 392 mouvements dans les registres de la Sécurité sociale, ce qui donne une idée de l’énorme instabilité qui existe dans l’emploi.

La fraude est si évidente que le gouvernement précédent avait annoncé mettre en marche des campagnes de prévention de ces hausses et baisses frauduleuses, qui ne se produisent pas seulement dans les secteurs peu qualifiés, comme la construction, mais aussi dans des secteurs structurellement plus stables, comme l’éducation. Et, chose plus significative, aussi dans le secteur public. Beaucoup de communautés autonomes licencient encore bon nombre de leurs professeurs avant l’été pour les réembaucher en septembre, ce qui, d’après la législation, est une fraude. Baisses et hausses. En juillet, par exemple, le secteur de l’éducation a représenté une diminution de 109 224 cotisants à la Sécurité sociale, alors qu’au mois d’août ce chiffre a été établi à 57 706 cotisants en moins. Au total, presque 167 000 professionnels de l’éducation touchent le chômage pendant l’été, mais seront embauchés en septembre de nouveau par les mêmes entreprises, et souvent par les mêmes administrations.

Ce comportement se produit malgré le fait qu’un récent jugement du Tribunal suprême a invalidé les cessations d’activité des professeurs intérimaires, comprenant qu’il s’agissait d’une discrimination par rapport à d’autres professionnels. La sentence, datant du mois de juin dernier, a estimé que l’interruption des fonctionnaires enseignants intérimaires des centres non universitaires est illégale à la fin de la période d’enseignement de l’année scolaire, car elle n’est fondée que sur le fait que pendant les mois de juillet et août la nécessité et l’urgence qui ont motivé leur embauche n’existent plus. Les magistrats du Tribunal suprême rappellent dans leur jugement que les fonctions qui sont propres au poste de travail pour lequel l’enseignant intérimaire a été embauché ne sont pas seulement celles du strict enseignement mais d’autres aussi qui se réalisent au mois de juillet de l’année académique et scolaire.

 Fin du texte

 

 

 

 

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