Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
SPARTACUS
Archives
Derniers commentaires
28 novembre 2012

Le mouvement spontané des mineurs d' Afrique du Sud: ses causes et conséquences (1ére partie)

Situer l’Afrique du Sud

- 1221 000 km² : 2 fois la France

- 50 millions d’habitants comportant 77% de Noirs, 13% de Blancs, 8,5 % de métis et 1,5% d’indiens

- 60 % de cette population vit dans des villes

- l’âge moyen est de 24 ans (30% a de 0 à 14 ans) et l’espérance de vie est de 53 ans (seulement 5,7% ont plus de 65 ans, 18% de la population est atteinte du SIDA)

C’est la plus grande économie des pays d’Afrique (et la 28ième mondiale). L’Afrique du Sud n’échappe pas à la malédiction de l’Afrique en général :

«  L’Afrique est un riche continent avec un record de peuples pauvres. Presque chaque minéral de la planète peut y être trouvé, souvent dans de riches filons. La découverte de ces richesses est une des raisons pour lesquelles les pays européens découpent l’Afrique en tranches à la fin du 19ième siècle. De grandes richesses ont été créées et de vastes fortunes ont été édifiées de l’exploitation minière mais des vies et des ressources naturelles ont été détruites. La plus grande partie de ces richesses a été déversée hors du continent africain et aucun des peuples concernés n’en a bénéficié. .On est en contact chaque jour avec un produit du sol africain : aluminium, acier et cuivre des voitures et de l’électricité, le coltran des portables, etc... » (1)

 L’économie sud africaine correspond bien à ce schéma d’une colonisation qui n’a disparu que pour laisser la place à une autre forme de domination capitaliste. Ses richesses minières et la présence de longue date d’une minorité importante de Blancs firent que l’Afrique du Sud ne devint un Etat indépendant qu’en 1961 après tout au long du 19ième et 20ième siècles de combats avec le colonisateur britannique : mais, comme partout en Afrique, ce colonisateur ne passait la main qu’en conservant de puissants intérêts économiques.

 Comme dans beaucoup d’ex colonies, l’Afrique du Sud a, du point de vue économique et du point de vue social, des points communs et d’importantes spécificités. Un des points communs est l’exploitation des richesses surtout minières par les multinationales ; une des spécificités est l’existence de la minorité blanche qui, jusqu’à une date récente a tenté de maintenir l’écrasante majorité noire dans une situation totale de dépendance économique.

 Le sort des exploités d’hier, d’aujourd’hui et de demain

 L’un de ces moyens l’apartheid ethnique a longtemps masqué l’apartheid social qui s’est révélé au grand jour lorsque – formellement – en 1991 la minorité blanche y a mis fin tant pour des raisons économiques que politiques. Vingt ans après, peu de choses ont changé dans la situation sociale de l’importante population noire sauf qu’environ 10% des Noirs (dénommés « black diamonds ») ont été intégré dans l’appareil national et international de gestion du capital, ce qui apparaîtra en pleine lumière dans les luttes autour des exploitations minières.

 La fin de l’apartheid soulevait beaucoup d’espoirs chez les Noirs. Une partie de ces espoirs concernait la propriété de la terre. Une réforme agraire a été entreprise (2) mais dans des conditions si complexes que pratiquement peu de choses ont été changées et la conclusion en est que les Blancs possèdent encore 87% des terres (les meilleures). Aujourd’hui bien que l’agriculture ne constitue due 3% du PIB, elle emploie encore 30% de la population noire, dans des conditions qui la pousse vers l’exploitation dans les mines et les usines : dans ces secteurs seulement pourtant 25% de cette population noire s’y retrouve. Le chômage reste constant et endémique, presque indépendamment de la crise mondiale : officiellement 25%, en fait 40% des Noirs et près de 45% chez les jeunes

 La condition de la population noire

 La violence de la répression lors de la grève à la mine de platine de Marikana a focalisé les médias sur la violence dans les rapports sociaux en Afrique du Sud, violence qui était pratiquement ignorée encore récemment. Cette violence ne peut qu’être reliée, non seulement à ce taux de chômage mais à l’ensemble des conditions de vie de la population noire.

37% de la population (essentiellement noire) vit avec moins de1, 60 euros par jour et un quart de ceux-ci avec moins de 1 euro. 15 millions de sud africains n’échappent à la faim que par les allocations mensuelles de secours et chaque salarié soutient en moyenne huit personnes dans de larges relations familiales (les femmes de trouvent pas d’emploi dans et autour des mines). 50% des Noirs au travail gagnent moins de 300 euros ce qui est souvent le seul revenu familial.

 Les journalistes découvriront des mineurs de Marikana, un des centres de la révolte et de la répression sanglante : la plupart des mineurs habitent le township voisin de la mine, il s’agit de campements sauvages en tôle entre lesquels errent chiens et chèvres, sans aucune viabilité et sans réseau sanitaire ; il n’y a pas d’eau courante et pas d’électricité, la plupart doivent payer 80 euros mensuels pour s’empiler dans d’étroits espaces, soit avec les familles, soir à 8 à 10 autres mineurs. Un autre témoignage récent constate que «  Au RDP township, nous trouvons le système d’égouts brisé se déversant directement dans la rivière en différents endroits…Les résidents l’ont maintes fois signalé pendant plus de 5 ans mais sans résultats.. Des résidents habitants près de ces fuites ont vu leurs enfants atteints de maladies chroniques associées à ces épandages sauvages. » (3)

Cela ne diffère guère des autres townships répandus dans tout le pays. Un autre texte en décrit l’atmosphère : «. bas salaires, pauvres allocations de secours sont liés à la désintégration sociale : crime, meurtre, viols et prostitution, chômage et pauvreté autour de la troisième plus riche mine de platine du monde est un incubateur de la colère des travailleurs et de la communauté » (3)

Dans ces bidonvilles, on trouve une grande diversité de migrants venant des régions éloignées de l’Afrique tout comme des Etats voisins. On compterait plus de 4 millions de travailleurs étrangers (certains pensent qu’ils sont 8 millions).  En 2012, sur plus de 3 millions de migrants étrangers recensés, seuls 200 000 étaient « légaux » le reste « illégaux ». Ils n’ont aucune qualification, souvent illettrés et, comme partout acceptent d’être payés au plus bas Ils sont recrutés sur la base de contrats renouvelables de trois mois. La compétition dans la misère a développé depuis des dizaines années des attaques individuelles ou collectives contre ces immigrés. C’est une longue liste d’agressions et de mobilisations contre les étrangers qui culmineront dans les émeutes de mai-juin 2008 (62 morts, près de 1000 blessés et jusqu’à 200 000 immigrants déplacés) (4). Cette situation perdure aujourd’hui et alimente la violence quotidienne.

Parfois, certaines compagnies minières contribuent à des dépenses sociales (hôpitaux, écoles ou logement) mais pratiquement aucune ne se soucie de l’impact environnemental, économique, social de leur activité. Un exemple, entre autre de la fonderie de platine de Rustenburg dont les émissions de CO² et de SO² causent des affections respiratoires et entraînent des pluies acides locales qui stérilisent la terre et rendent les exploitations agricoles plus qu’aléatoires. Ce qui permet à la compagnie minière de les racheter ou pour les laisser en friches ( favorisant l’installation de townships) ou en faire des terrains de déversement des rebuts solides ou liquides de la mine ( ce qui accroît d’autant la pollution des eaux et de l’air) (5)

 Résistances ouvrières et sociales

 L’Afrique du Sud, ne serait-ce que depuis la fin de l’apartheid en 1991 n’a pas cessé de connaître des luttes tant dans les townships que sur les lieux de travail : la raison en est simple, l’apartheid politique n’a disparu que formellement faisant tomber le masque de ce qui n’était en fait qu’un apartheid social. Les luttes ont pris alors leur véritable caractère de luttes contre le système, de luttes de classe. La discrimination est partout notamment dans l’éducation : 65% du million de jeunes noirs qui quittent l’école chaque année n’on aucun diplôme

Depuis des années il n’est pas de semaine où des protestations éclatent en particuliers dans les townships autour des problèmes du quotidien, la plupart ignorés par les médias et par les politiciens. En 2011, 38% de la population doit « vivre » avec moins de 40 euros par mois. Récemment, avec l’aggravation de la misère ces mini émeutes sont sorties des frontières des townships pour s’étendre dans les secteurs classes moyennes (6)

Ces protestations prennent les mêmes formes de luttes : blocages routiers sortant maintenant du secteur local, destruction de bâtiments publics :

« C’est un cercle vicieux qui voit les paumés et les exclus incendier toute institution représentant l’Etat depuis les écoles, les bibliothèques et tout bâtiment officiel » (6)

On peut se faire une idée de ce que sont ces affrontements par ce qui se passe le dimanche 12 août, indépendamment du mouvement de grève dans les mines, dans le township de Khayelitsha dans la banlieue du Cap (plus d’un million d’habitants avec un taux de chômage d’environ 70%), à la tombée de la nuit autour de questions de logement et de sanitaires : quelques barricades sont édifiées à des croisements routiers. Après qu’elles sont éteintes par les pompiers et flics qui quittent la scène, d’autres barricades sont édifiées. La police revient en force mais les protestataires se regroupent ; plus de 400 se bagarrent avec les flics. D’autres parties du township s’enflamment. Un chauffeur est tué et sa voiture incendiée. La ligne de chemin de fer proche est bloquée. Des tirs à balles contre les flics qui répondent avec des balles en caoutchouc et des canons à eau.  Le lundi il y a sept points d’une guérilla urbaine dans le township. Seulement 10 arrestations. Ces mini émeutes récurrentes (plus de 10 000 en moyenne impliquant entre 2008 et 2009 plus de 3 millions de participants) ne sont pas la seule activité « illégale. Un mouvement de base se charge de la reconnexion des coupures d’eau et d’électricité ; un centre communautaire anime un jardin d’enfants et, à l’occasion, occupe des terres pour l’agrandissement du bidonville. Ces mouvements, aussi bien de solidarité que d’affrontements bien qu’étant le fait d’une minorité, ont le soutien total des communautés concernées. (7)

Ce n’est qu’un exemple parmi bien d’autres qui rythment en quelque sorte la vie quotidienne de l’Afrique. Comme une bonne partie des travailleurs noirs vivent dans de telles townships, souvent proche des exploitations minières, il n’est pas étonnant que les grèves trouvent leur organisation et même leur genèse dans ces cités sauvages, adoptant des méthodes de lutte semblables, d’autant plus que les lieux de production sont sévèrement entourées de ceintures barbelées et gardées par une police privée particulièrement musclée et la police tout court.

Lors de la répression sanglante de Marikana un commentaire situera l’action de la police dans l’ensemble de la répression des divers mouvements de lutte des townships comme des entreprises notamment minières : « Depuis 10 ans, la police sud africaine n’est plus dirigée par des professionnels mais par des hommes politiques corrompus qui ont démantelé les unités spécialisées pour en faire un instrument au service du parti au pouvoir comme au temps de l’apartheid ». Ce que confirme cet autre commentaire : »La réaction disproportionnée de la police est due à un manque chronique au sein des troupes de compétences et d’armements adéquats » (8)

Mais cette situation n’explique nullement l’action de ces forces armées – police ordinaire, sections spéciales et armée régulière car, pour le massacre de Marikana, il « semble vraisemblable que la décision ait été de donner un avertissement exemplaire sur les mineurs afin d’intimider et de décourager les travailleurs de se lancer dans de futures actions » (9). Il ne fait aucun doute en effet que non seulement les révoltes récurrentes dans les townships devenaient difficile à endiguer mais que tant dans les services publics que dans l’industrie et dans les mines, les grèves étaient pratiquement endémiques, pas tant dans de grands mouvements à l’échelle nationale que dans les « petits » conflits. Chacune des années récentes on a compté plus de 2 millions de travailleurs en grève, recensés mais rien que dans la mine de platine de Lonmin des arrêts répétés dans cette même période concernant principalement la sécurité ne sont jamais signalés.

Pendant ces années également, l’intervention brutale de la police dans tous les secteurs de lutte est tout autant récurrente avec souvent des morts, des blessés, parfois des deux côtés. (chaque année une moyenne de 100 flics sont tués, en août 2012 on en dénombre déjà 57)

Mais, endigués tant bien que mal, émeutes et grèves finissent par avoir un impact sur le développement économique :

«  Ces protestations, spécialement quand elles sont coordonnées ont un effet perturbateur maximum sur la classe moyenne et l’élite, peuvent avoir un profond effet positif sur le long terme…Même quand ces actions amènent un certain niveau de violence…cela peut signifier aussi une action favorable comme ralentissant le flux de l’accumulation capitaliste ou faire pression sur la classe dominante pour faire quelques concessions d’urgence » (6) Cette vision réformiste est contredite par la déclaration du Ministre des ressources minérales qui, devant la vague de grèves sauvages, en bon gestionnaire du capital des multinationales déclare :

« Le plus grand challenge que rencontre notre pays est quand de telles grèves spontanées surgissent régulièrement et qu’on ne peut prévoir quand elles s’arrêtent parce qu’il n’y a rien pour nous en informer » (10) Ce qui nous amène à parler de l’importance que prennent les grèves sauvages depuis l’été dans les mines non seulement pour la classe dominante d’Afrique du Sud, mais pour l’ensemble du capitalisme mondial.

La situation du capital et de ses agents à travers la lutte de classe dans le secteur minier d’Afrique du Sud

 Cette question doit être abordée sous deux aspects, d’une part celui de ce que représente l’industrie minière dans l’économie de l’Afrique du Sud, de l’autre la politique des multinationales minières c'est-à-dire l’intérêt des mines d’Afrique du Sud pour le capital. Dans les commentaires sur la révolte des mineurs, peu se réfèrent à ces données dans lesquelles la crise mondiale du capital interfère également.

Dans la période récente, la place de l’ensemble des industries minières – essentiellement exportatrice a décliné constamment et cela bien avant la crise mondiale. Dans le PIB du pays la part de la production minière est passée de 20% en 1985, à 8,5 % en 2003, à 5 ,5 % en 2012. Les mines d’or qui en 1976 représentaient 20 % de la production mondiale n’en représentent plus que 10% en 2011. Cette production d’or est passée de 1 000tonnes en 1970 à 200 tonnes en 2011. Alors que l’Afrique du Sud possède encore 80% des réserves mondiales de platine, de manganèse et de diamant (sauf découverte de nouveaux gisements comme en Mongolie), dans la période 2001-2008, le vingt multinationales minières ont accru leur chiffre d’affaire de 5% alors que globalement, celui des mines sud africaines régressait de 1%.

La cause principale de ce déclin est triple : la vétusté des mines en général, l’ouverture mondiale d e mines plus rentables et la crise mondiale. Dans la course capitaliste aux exploitations minières, l’Afrique du Sud, après avoir détenu très tôt un quasi monopole (qui explique les luttes dans sa colonisation) paie l’inconvénient de cette antériorité. Les premières mines de diamant furent ouvertes il y a près de 150 ans et les autres mines ont suivi, ce qui fait que les exploitations ont du creuser toujours plus profond, ce qui accroît d’autant les coûts de production – dont le coût du travail (certaines mines sont aujourd’hui à plus de 4 000m sous terre). Même si l’Afrique du Sud garde encore une place importante dans le production minière mondiale (premier avec 58 ,7% pour le platine et 80% des réserves mondiales, cinquième avec 7,8% pour l’or, 7ième pour le charbon avec 3,6%, 6ième pour le minerai de fer avec 3,5% et un rang non négligeable pour d’autre métaux plus rares), cette place est de plus en plus contestée à cause non seulement de l’aggravation des conditions matérielles d’exploitation mais surtout de la découvertes de mines beaucoup plus rentables dans le monde entier, d’où une fuite des capitaux qui vont s’investir ailleurs.

La chute est d’autant plus tragique que le secteur minier a connu, dans les années précédant la crise un boom avant la crise notamment par la demande de la Chine et de l’Asie du Sud-est ce qui a attiré nouveaux investissements et recrutement de mineurs. La crise économique a provoqué une chute brutale de la demande, fait annuler les projets et entraîné la fermeture des mines avec des répercussions sur les secteurs nationaux de fourniture de biens d’équipement. De leur côté, les multinationales connaissaient des problèmes financiers avec leurs marges de profit réduites.

Les répercussions pour les gestionnaires du capital en Afrique du Sud sont énormes avec la nécessité d’orienter différemment l’activité économique pour endiguer la crise sociale dont la situation que nous avons décrite pour l’ensemble du prolétariat et les grèves récentes sont l’expression. La violence dans ces rapports sociaux, tant dans l’ensemble d’actions illégales et de grèves sauvages que dans la répression brutale ne sont que l’expression de l’acuité de la crise pas tant pour le capital multinational ( qui peut toujours aller ailleurs) que pour la classe nationale dominante. Mais cette violence même n’est pas faite pour attirer les investisseurs mondiaux dans les secteurs considérés comme essentiels pour, au moins, atténuer le marasme économique et la crise sociale conséquente. D’un autre côté, bien modestement et en contradiction avec la nécessité de développer un marché intérieur, les dirigeants d’Afrique du Sud tentent de jouer un rôle dans le développement économique de l’Afrique.

 L’industrie du platine en Afrique du Sud

Si l’on considère l’importance de cette industrie minière qui occupe la première place mondiale ( la Russie et le Canada sont les seuls autre producteurs importants actuellement), elle l’est aussi par l’importance de l’exploitation ouvrière : sur un total de 500 000 pour toute l’industrie minière sud africaine ( plus d’un million avec tous les emplois induits) 180 000 sont exploités dans le platine contre 150 000 pour l’or, 74 000 pour le charbon et 78 000 pour le reste dont 18 000 pour le minerai de fer.

Le platine vaut aussi cher que l’or (actuellement 40 euros le gramme environ pour les deux) mais leur utilisation est très différente, si l’on met de côté le rôle monétaire de l’or. Le platine est devenu un produit industriel notamment par son utilisation multiple depuis les pots d’échappement catalytiques jusqu’aux têtes de missiles en passant par les briquets (ce qui l’a fait classer comme produit stratégique) (11). Cette utilisation explique son essor et sa chute liés à l’activité économique mondiale et notamment les hauts et les bas de l’industrie automobile mondiale. Ce n’est donc pas un hasard si, en Afrique du Sud, le conflit social va se concrétiser d’abord sur les exploitations minières de platine.

La production est souvent associée à d’autres minerais ; elle nécessite à la fois d’énormes investissements tant dans la mine que dans le traitement du minerai et une importante main d’œuvre dont le nombre est concentré surtout dans l’abattage de la roche et dans l’exploitation des Noirs alors que le processus ultérieur exploite plutôt des Blancs. Le principales multinationales exploitants et exploiteurs sont Anglo American (dénommé Amplats pour la section platine) (70 tonnes annuelles), Impala Platinum (55tonnes), Lonmin (22 tonnes) alors que la mine russe concurrente à Norilsk n’en produit que 20 tonnes. Anglo American ne fait pas que dans le platine mais est diversifiée dans le fer (Brésil), le cuivre (Chili) ou le charbon (Australie)

L’extraction du platine nécessite un processus complexe à la fois chimique, magnétique et mécanique. Pour extraire entre 1 et 3 grammes de platine il faut traiter 1 tonne de minerai. C’est dire l’importance de ceux qui au fond de la mine abattent la roche : c’est le début du processus et leur grève paralyse tout, au moins à terme car des dépôts en surface tendent à prévenir l’effet des grèves limitées fréquentes, surtout sur des questions de sécurité.

Ce qu’on a pu voir décrire pour les mineurs de la mine de Lonmin à Marikana, c’est en gros les mêmes conditions de travail dans les diverses mines souterraines dans lesquelles ont doit abattre des pans entiers de roche pour obtenir quelques grammes d’un métal précieux ou un diamant. Cela se fait en perforant profondément cette roche au marteau piqueur, en y introduisant ensuite un explosif et à évacuer ensuite les débris à la surface. C’est dire l’importance de ces « drill operators » et du capital variable dans les mines (dans le platine, les salaires représentent 60 % des coûts de production) Les « drill operators » travaillent dans des conditions particulièrement difficiles :

« …même le ministre du commerce et de l’industrie les a décrits comme « épouvantables ». Non seulement les travailleurs sont soumis à une exploitation extrême, mais ils subissent souvent l’oppression et la domination des dirigeants de la mine, des contremaîtres, superviseurs et des membres de la sécurité. Les niveaux élevés de sécurité dans les mines signifient que les travailleurs sont constamment surveillés par des gardes de sécurité et par des circuits de caméras, détection par scannage de l’iris de l’œil dans l’entreprise et les fouilles corporelles humiliantes à la fin de la brigade.

En plus de l’oppression et de la domination routinière auxquelles sont confrontés les mineurs, les conditions de travail dans les mines sont très dangereuses et malsaines. L’équipement lourd avec lequel les mineurs travaillent à des centaines de mètres sous terre, la chaleur intense et des endroits exigus causent des dommages permanents aux oreilles chez de nombreux travailleurs. Ils souffrent également de problèmes causés par l’eau industrielle utilisée pour le refroidissement. De nombreux autres mineurs souffrent de silicose par inhalation de poussière de roche lors du perçage (12). Afin de compléter leur revenu de base, de nombreux mineurs sont obligés de prendre des risques, comme travailler de longues heures sans sécurité pour obtenir des bonus de production qui deviennent une partie importante de leur revenu » (13)

« Après quelques années, les mineurs sont des vieillards » car à ce tableau on doit ajouter que leur vie sous terre dure 12 heures le plus souvent et que sortis du bagne leurs mains sont encore pour un bon moment agitées de tremblements. La crise mondiale a, comme partout entraîné une pression supplémentaire sur les conditions de travail déjà particulièrement dangereuses : en atteste ce seul chiffre des accidents et des réaction à la seule mine d’Anglo Platinum il y a eu 12 morts par accident en 2011 contre 8 en 2010 et 81 grèves contre le manque de sécurité contre 36 en 2010. A Marikana (mine de Lonmin), depuis le début 2011, le nombre de morts par accident a doublé. Tout cela pour des salaires de misère que nous évoquerons ci-après. Auparavant un tableau des intermédiaires dans la régulation de l’exploitation et la médiation travailleurs – exploiteurs par les structures politiques et syndicales

Qui peut protéger les mineurs dans ces conditions d’exploitation ?

 Il serait trop long d’exposer ici l’évolution des structures politiques et syndicales depuis la fin de l’apartheid et la transformation des organes de lutte anti apartheid en organes de domination politique et syndicales dignes de ceux des pays totalitaires.

Le gouvernement présent est l’expression d’une coalition entre l’ANC (African National Congress), le COSATU (Congrès des Syndicats d’Afrique du Sud) et du SACP (Parti Comuniste d’Afrique du Sud). Il est aussi l’expression de l’intégration de ces dirigeants politiques dans l’appareil de gestion directe du capitalisme installé en Afrique du Sud. Un certain nombre des hauts responsables de l’ANC et des familles qui y sont liées ont d’énormes intérêts économiques dans les sociétés minières notamment. Dans ces conditions , toute grève sauvage est non seulement une menace pour leur gestion politique mais aussi une menace directe pour leurs intérêts capitaliste. « Toute menace sur l’influence du NUM est une menace sur COSATU et sur l’ANC » (14)

Pour n’évoquer ici que les mines de platine, Cyril Ramaphosa , un ancien dirigeant du syndicat des mineurs NUM (300 000 adhérents) détient des participations dans Lonmin et a des intérêts dans des sous-traitants de la mine de Marikana ( il aurait amassé une fortune de 275 millions de dollars). Le président actuellement en exercice empoche rien que pour sa fonction syndicale 140 000 euros par an et il a bien d’autres « fonctions » parallèles rémunérées. Cette intégration globale dans l’appareil de gestion du capital n’est pas sans susciter, en dehors des grèves sauvages et des actions illégales dans les townships, des réactions d’appareil qui dissimulent souvent mal des ambitions politiques. C’est ainsi qu’un activiste de la ligue de la jeunesse de l’ANC, Malema, s’est fait expulser de l’ANC pour en contester la politique et les leaders et qu’il tente de consolider sa position d’exclu en se servant des affrontements sociaux de l’été. Du côté syndical, il existait déjà une fédération syndicale dissidente di COSATU. Le National Council of Trade Union (NCTU), fédération syndicale au sein de laquelle le syndicat Association of Miners and Construction Union (AMCU) tente d’organiser en particulier les travailleurs des mines, ce qui entraîne parfois des affrontements violents avec les membres du NUM. Des polémique se sont levées sur le rôle que l’AMCU dans la montée des grèves sauvages (le SACP, communiste parti, a même demandé récemment l’arrestation des leaders de l’AMCU) et effectivement, il est difficile de démêler la part des grèves sauvages sur lesquelles les opposants politiques ou syndicaux sont venus greffer leur propositions organisationnelles. De même dans l’organisation des comités de grève et dans leur coordination, il est difficile de cerner le rôle d’une organisation trotskyste d’affiliation internationale, le « Democratic Socialist Movement (SA) actif depuis 2007 qui veut former un parti politique ouvrier. Des membres de l’AMCU qui se présentent à Marikana après la tuerie souligne les difficultés qu’ils on eu de contacter les mineurs en grève et ceux qui animaient le mouvement en raison d’une méfiance générale à l’égard des politiques, même oppositionnels. Récemment l’AMCU aurait repris au NUM la moitié de travailleurs de la mine d’Impala Platinum ce qui les autorise à demander légalement la reconnaissance syndicale dans la mine et bien sûr de jouer le rôle syndical traditionnel. Comme le souligne l’interview déjà cité : « L’AMCU pourrait être un peu mieux que le NUM car elle est indépendante de l’UNC et du SACP, mais ce n’est certainement pas un syndicat contrôlé par la base ouvrière. Etre un syndicat légaliste et les intérêts de sa bureaucratie lui interdisent de soutenir l’action directe autogérée des travailleurs pendant une grève sauvage et les occupations » (15)

 

Publicité
Publicité
Commentaires
SPARTACUS
  • Information sur le mouvement des conseils ouvriers de la gauche germano-Hollandaise, ainsi que sur la lutte de classe dans le monde. voir en complément le site MONDIALISME. Pour correspondre:
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
SPARTACUS
Visiteurs
Hier 14
Depuis la création 321 511
Publicité